Ce sont deux affaires très rapprochées dans le temps qui posent le discrédit sur Google. Le géant américain de la recherche est accusé d’avoir saboté le service OpenStreetMap qui propose de la cartographie sous licence libre, et a reconnu par ailleurs l’existence d’actions de concurrence déloyale à l’encontre d’une société qui référençait des entreprises locales. Outre une adresse IP de Google en Inde, les deux affaires ont pour point commun le marché croissant du web local sur lequel Google fonde beaucoup d’espoir.

Google a-t-il du mal à tenir ses troupes ? L’équipe du service de cartographie libre OpenStreetMap indique sur son blog qu’elle a été victime d’une forme de sabotage effectué depuis des adresses IP appartenant au géant américain.

A la manière de Wikipédia, tout internaute peut modifier les tracés routiers d’OSM pour les mettre à jour et améliorer constamment leur exactitude, les cartes étant mises à disposition de tous sous licence libre. Plus le service sera meilleur, plus les internautes seront tentés de l’utiliser plutôt que de se rendre sur des services propriétaires comme Mappy, ViaMichelin, Bing Maps, ou… Google Maps.

Or, selon l’équipe d’OpenStreetMap, des modifications volontairement fausses auraient été effectuées depuis des adresses IP appartenant à une plage d’adresses attribuées à Google en Inde. Les actions de sabotage ont consisté à supprimer ou déplacer certaines données cartographiées, ou de manière plus perverse, à inverser par exemple le sens de certaines routes à sens unique. Evidemment, plus le service contient d’erreurs, plus sa réputation est entâchée au bénéfice des concurrents. Les modifications frauduleuses ont été apportées notamment à Londres et à New York, où les utilisateurs potentiels d’OSM sont bien plus nombreux que dans les petites villes.

C’est jeudi dernier qu’OpenStreetMap a repéré pour la première fois ce qu’il qualifie de « vandalisme ». Mais en fouillant dans ses archives, « sur toute l’année dernière nous avons découvert plus de 102 000 requêtes sur OSM utilisant au moins 17 comptes de cette même plage d’adresses IP« , indique OSM qui mène une enquête plus approfondie.

Ce qui est peut-être plus troublant, c’est qu’OSM affirme que la plage d’adresses IP utilisée et appartenant à Google est la même que celle utilisée dans une autre affaire, très différente, où Google a dû reconnaître une manœuvre frauduleuse. Mocality, une start-up keynianne spécialisée dans le récensement d’entreprises de son pays, a découvert que Google avait lancé son service concurrent Getting Kenyan Businesses Online de manière bien peu orthodoxe. Des commerciaux travaillant pour Google appelaient chacune des 170 000 entreprises référencées en prétendant à tort disposer d’un partenariat avec Mocality, et en leur proposant d’acheter la création d’un site Internet.

« Ceci a débuté un peu avant Noel. Après les fêtes, Google chargeait carrément une plateforme indienne de prospecter par téléphone. 30% des entreprises de la base de données de Mocality auraient déjà été contactées par Google« , indique L’Informaticien. A la suite des révélations, le siège américain de Google a dû présenter ses excuses et reconnaître la manœuvre, qu’il a attribué à l’agissement isolé d’une « équipe travaillant pour un projet Google« .

Le point commun entre les deux affaires ? La géolocalisation.

Google mise très gros sur ses services de proximité rendus possibles par la géolocalisation, et fait de Google Maps le point central de ses futurs services. Ils permettront (et permettent déjà pour une part) de trouver les meilleurs prix ans les magasins à proximité, de découvrir des conseils sur les bars ou les restaurants du coin, de trouver facilement des artisans spécialisés dans un rayon de quelques kilomètres, etc.

Le moteur de recherche lui-même évolue pour proposer de plus en plus de résultats personnalisés selon la situation géographique de l’internaute, comme il le fait sur Google News en proposant une sélection d’actualités tirées de la presse régionale.

Pour les professionnels, cela induit une concurrence de visiblité locale accrue, qui les fera enchérir pour la publicité locale sur les services de Google. Il suffit de rechercher par exemple « Plombier Paris » pour s’en rendre compte. Le premier résultat qui n’est pas une publicité Adwords ou une adresse référencée dans Google Maps est relégué à 900 pixels sous la barre d’adresses. Ce qui le rend invisible sur la majorité des écrans :

Ce sont des milliards de dollars de recettes qui sont en jeu pour Google, qui avec l’intégration forcée de ses propres services sur les pages de résultat rend invisibles les services concurrents comme OpenStreetMap (ce qui pose la question de son éventuel abus de position dominante, et d’un possible découpage de ses activités). On peut donc comprendre la nervosité de Google sur ce marché, et surtout imaginer la pression mise sur les sous-traitants à qui la firme demande des résultats.

Une pression telle qu’elle les pousse à commettre ce type de vandalismes ?

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