Dans la majorité parlementaire, certains élus s’intéressent de près aux questions de société liées au numérique, et ont développé de réelles compétences sur le sujet. C’est le cas par exemple à l’UMP des députés Lionel Tardy et Laure de la Raudière. D’autres interviennent tout autant sur ces questions, et font beaucoup plus rire qu’avancer les débats.
C’est le cas, à ses dépens de Muriel Marland-Militello. La députée a régulièrement pris position sur différentes thématiques : piratage de site web, licence globale, attaque DDOS, eG8, Internet civilisé, neutralité du net, Hadopi, fracture numérique, Anonymous… rien ou presque n’échappe à la parlementaire. Alors, évidemment, nous attendions avec une impatience non dissimulée son avis sur MegaUpload.
Avis qui est finalement arrivé sur son blog dans la journée.
Une décision de justice ?
D’emblée, la couleur est annoncée. Alors que les responsables du site sont pour l’heure mis en examen, la députée ne s’embarrasse par de la procédure judiciaire en cours et évoque un « MegaUpload enfin condamné« . Et la présomption d’innocence, qu’elle réclamait jadis pour un ministre « porteur d’une réforme majeure » ? Bafouée, puisque la sentence est déjà tombée, aux yeux de Muriel Marland Militello.
Considérant l’arrêt des activités de MegaUpload comme une « étape importante dans l’histoire de l’internet responsable« , l’élue applaudit cette opération qui montre « que les droits des créateurs ne peuvent plus être bafoués impunément sur Internet » et qui met un terme à un phénomène qui ne peut conduire, selon elle, qu’à l’appauvrissement de l’offre artistique.
Mais si le FBI et le département de la justice ont conduit l’opération visant à mettre un terme au service d’hébergement de fichiers en un clic, Muriel Marland-Militello considère que c’est surtout « grâce aux initiatives de notre Président de la République Nicolas Sarkozy que la communauté internationale est décidée à ne plus céder à un certain fatalisme qui pouvait exister en la matière« .
Et d’évoquer à tort une « décision de justice« , alors qu’aucun tribunal n’a rendu de verdict dans cette affaire.
L’homme qui a dit non
Mieux encore. Le dynamisme que prête Muriel Marland-Militello à Nicolas Sarkozy en matière culturel finira par être salué par l’Histoire . « L’histoire de la culture se souviendra de Nicolas Sarkozy comme de l’homme qui a dit non« . Et d’asséner que « le piratage est un danger pour l’avenir de notre civilisation« .
Pas convaincu ? Prenez garde, car « le nier relève d’une idéologie libertaire d’une autre époque ou d’une profonde méconnaissance de la création artistique et du rôle des industries culturelles dans ce processus. Et si vous pensez différemment des ayatollahs du numérique, on vous taxera d’e-gnaritude… Mais nous ne nous laisserons pas impressionner !« .
La députée profite par ailleurs pour se mêler au débat sémantique sur les concepts de copie et de vol dans la sphère numérique. « Une justification souvent mise en avant pour justifier le piratage est de dire que si l’on copie un fichier, ce n’est pas du vol car le fichier initial est toujours disponible. Merci pour cette vérité d’évidence, […] mais les conclusions qu’en tirent ces personnes sont idiotes voire malhonnêtes« .
Pirater, c’est voler
Muriel Marland-Militello dresse alors un parallèle avec les albums de musique. « Quand elles achetaient des CD, achetaient-elles uniquement le morceau de plastique, support de la musique ? Si oui, c’était cher payé… Naturellement, ce qui fait la valeur c’est l’œuvre de l’esprit elle-même, qu’elle soit sur un CD ou sur un DVD ou qu’elle soit dématérialisée« .
Et donc « pirater, c’est voler les fruits du travail des artistes et de tous les acteurs qui sont nécessaires à l’émergence et au développement de l’artiste« . Saluant une nouvelle fois le courage de Nicolas Sarkozy d’avoir tenu bon en instaurant l’Hadopi, « formidable autorité administrative indépendante« , elle en profite pour tacler les partis adversaires qui veulent tous s’en débarrasser.
Les propos de la parlementaire ne manqueront évidemment pas de faire réagir. Comme l’avait expliqué Benjamin Bayart en 2010, de tels propos risquent de creuser un peu plus le fossé entre une frange des internautes et une partie de la classe politique et des ayants droit. Pas sûr que le message soit bien passé, au moment où le piratage est décrit comme une « gangrène idéologique » par la députée
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