L’histoire atypique du « détecteur de conneries » illustre la complexité de la lutte anti-désinformation sur Facebook, au cœur des débats depuis l’élection présidentielle américaine.

Pour prouver à Mark Zuckerberg à quel point il avait tort de minimiser l’impact des articles de désinformation sur Facebook, Daniel Sieradski, un journaliste indépendant de 37 ans, a réalisé une extension de navigateur permettant de vérifier la véracité d’une actualité sur le réseau social.

Une fois installé, le  « BS Detector » (« détecteur de conneries »)  ajoute au-dessus des articles erronés ou mensongers un avertissement explicite  — « Ce site n’est pas une source fiable d’actualité » — accompagné d’une précision (« Motif : théorie du complot », par exemple).

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Le BS Detector, qui aurait été téléchargé plus de 25 000 fois selon son créateur, repose sur un principe simple : il compare les liens postés sur Facebook avec sa compilation — mise à jour régulièrement — de sites d’actualité d’une fiabilité douteuse. Si l’extension détecte une concordance entre les deux, elle déploie alors son avertissement sur fond rouge. La méthode permet aussi de classer les actualités selon différentes catégories : fausse information, satire, article très orienté, théorie conspirationniste…

Quand l’outil anti-désinformation alimente lui-même une fausse actualité 

Ironiquement, le détecteur de désinformation a lui-même alimenté indirectement ce fléau après l’annonce, par le site spécialisé TechCrunch, du déploiement d’un outil anti-désinformation par Facebook. Le média avait visiblement oublié qu’il avait simplement téléchargé le BS Detector auparavant et que celui-ci était activé…

Sieradski est sidéré par cette méprise : « Je pense que c’est l’une des choses les plus métaphysiques que j’ai pu voir : une fausse actualité à propos d’un détecteur de fausse actualité. » Il s’empresse de contacter le média pour souligner cette erreur. TechCrunch met son article à jour.

Pour Daniel Sieradski, « la prolifération de la désinformation a sérieusement réduit la capacité des gens à faire des choix en connaissance de cause quand il s’agit de politique. » À ses yeux, il est donc fondamental de rétablir des filtres et des avertissements.

Facebook a d’abord bloqué le lien vers l’extension avant de reculer 

Visiblement gêné par l’initiative de Sieradksi et de son détecteur, Facebook n’a pas tardé à bloquer la diffusion, sur sa plateforme, du lien menant au GitHub de l’extension, pour « des raisons de sécurité » selon le message d’erreur adressé aux utilisateurs qui souhaitaient le partager.

Le créateur de l’extension explique au Guardian que selon lui « ce n’est évidemment pas pour des raisons de sécurité, car l’extension n’affecte aucun paramètre de sécurité. Cela n’affecte pas l’intégrité de Facebook, l’extension ajoute seulement des éléments HTML sur une page. Elle ne fait rien de malveillant… Je pense que [Facebook] n’a pas du tout aimé l’article de TechCrunch. »

Si Facebook n’a pas répondu aux sollicitations du quotidien anglais sur la question, il a toutefois fini par débloquer le lien quelques heures après, en prétendant avoir fait une erreur. Exactement comme M. Sieradski l’avait lui-même prévu dans un tweet :

https://twitter.com/selfagency/status/804708836133244928?ref_src=twsrc%5Etfw

En fin de compte, l’histoire nous révèle surtout la grande méfiance du monde de la presse technologique sur la volonté de Facebook l’idée de régler le problème de la désinformation.

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