L’association des fournisseurs d’accès à internet au Pakistan s’est dite favorable au projet de « grand firewall » des autorités pakistanaises, qui souhaitent pouvoir bloquer jusqu’à 50 millions de sites sans contrôle judiciaire, par un système automatisé.

La situation est des plus floues au Pakistan. Fin février, nous avions détaillé dans nos colonnes l’appel d’offres lancé par les autorités pakistanaises pour acquérir un système de filtrage et de blocage massif des contenus, qui serait installé au niveau des backbones qui constituent les points névralgiques du réseau du pays, à Karachi, Lahore et Islamabad. Le système composé de routeurs spécialisés dans le DPI devait être capable de bloquer jusqu’à 50 millions d’URL avec un temps de latence de moins d’un millisecondes, et se basait sur une mystérieuse liste noire « régulièrement mise à jour à travers un abonnement à une société internationale réputée qui maintient et met à jour de telles bases de données« .

Très large, le système viserait à bloquer les contenus « blasphématoires« , « pornographiques« , et ceux qui « font peser une menace sur la sécurité nationale » (rappelons que les opérateurs télécoms filtrent déjà les SMS pour interdire des centaines de mots à connotation sexuelle)

Un mois plus tard, rien n’avait été communiqué par le gouvernement pakistanais sur le résultat de l’appel d’offres achevé depuis le 2 mars 2012. Une parlementaire avait alors assuré que les autorités avaient finalement décidé d’abandonner le projet.

Mais toujours aucune confirmation officielle n’est intervenue, et le « grand firewall du Pakistan » semble toujours se préparer à son érection. De façon surprenante, au moins de vue de France, l’Association pakistanaise des Fournisseurs d’Accès à Internet (Ispak) s’est dite favorable au déploiement d’un tel système massif de filtrage automatisé, mis entre les mains des autorités.

« Il n’y a rien de mal dans le concept et le système ne compromettrait pas les performances d’Internet« , a indiqué à l’Express Tribune un responsable de l’association. « La pratique du blocage manuel des URL est déjà en place. Si le gouvernement veut bloquer un site qui fait peser une menace sur la sécurité nationale, il n’a pas besoin du système automatisé. S’opposer à l’idée d’un système automatisé, dès lors, ne fait aucun sens« .

Même son de cloche, plus attendu, du côté de l’Autorité pakistanaise des télécommunications, qui explique qu’un « système abordable, automatisé et transparent pour bloquer les contenus blasphématoires et contestables est pleinement soutenu » par elle. « Le processus actuel de blocage, manuel et fastidieux, est difficile à implémenter et a ses limites« .

« On ne peut nier les avantages d’Internet, mais il ne faut pas que ça se fasse au détriment des normes religieuses« , estime le président de l’Autorité Muhammad Yaseen.

Pour tenter de contrer le déploiement du filtrage massif, une plainte a été déposée pour que les tribunaux obligent les autorités à respecter une procédure contradictoire avant tout blocage de contenus. Actuellement, les sites peuvent être bloqués sans qu’aucun ne puisse se défendre et contester la décision avant sa mise en application. Comme ce sera le cas en France avec la loi Loppsi.

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