Ce mercredi 23 mai, le premier bureau de vote électronique à distance ouvrira ses portes pour les Français de l’étranger qui ont choisi de voter par internet aux élections législatives de 2012. Dans l’indifférence quasi générale, 700 000 électeurs sont appelés à glisser leur bulletin dans une urne virtuelle qu’aucun citoyen ne pourra contrôler, pour élire 11 représentants à l’Assemblée Nationale.
Le Bureau de vote électronique (BVE) recueillera à lui seul les votes des 700 000 électeurs de l’étranger qui ont choisi ce mode de scrutin, alors que pour les bureaux de vote physiques, selon les propres instructions du ministère de l’intérieur, « il est préconisé de ne pas excéder le nombre de 800 à 1 000 électeurs inscrits par bureau« .
Malgré son importance gigantesque, inédite dans l’histoire de la République Française, seuls 5 des 178 candidats des Français établis hors de France ont fait la démarche de désigner un « délégué habilité à contrôler les opérations de vote par voie électronique« , comme le permet la loi. Parmi les 5 délégués, quatre sont ceux mandatés par les candidats à l’étranger du Parti Pirate, qui présente une centaine de candidats aux législatives. Ni l’UMP, ni le PS, ni les Verts, ni le Modem ne semblent préoccupés. Seul un candidat du Front de Gauche s’est joint au Parti Pirate pour tenter de contrôler la sincérité du scrutin.
Pour « tenter », car la réalité les en empêche. Les délégués ont eu vendredi dernier leur première réunion du BVE, et le compte-rendu du Parti Pirate n’a rien de rassurant, bien au contraire :
Pour le BVE qui contrôlera les opérations de vote de 700 000 électeurs, la réglementation a prévu seulement 7 titulaires (4 fonctionnaires d’État et 3 élus de l’Assemblée de Français de l’Étranger). La majorité des opérations est, de fait, effectuée par des prestataires privés, non soumis à des règles de transparence démocratique vis à vis des électeurs.
(…)
Nous avons pu constater une totale séparation des compétences et des observations : les trois élus du Bureau de Vote ont observé les éléments visibles lors de la cérémonie. Mais ils ne peuvent en rien attester des processus dématérialisés, dont la fiabilité repose totalement sur la parole des prestataires, techniciens venant d’entreprises privées.
Lors de la clôture officielle de l’urne électronique, les délégués du Parti Pirate ont constaté des défauts de sécurité importants. Ainsi la génération des clefs électroniques permettant l’ouverture de l’urne à l’issue du scrutin a eu lieu avec des outils informatiques dont l’intégrité n’était pas garantie. Par ailleurs, les clefs, censées être uniques et soumises à la garde des titulaires du bureau de vote, pourraient être dupliquées par toute personne ayant accès aux ordinateurs ayant permis leur génération, ces matériels n’ayant pas été correctement nettoyés devant les membres du Bureau de Vote.
Face à cette situation, les délégués du Parti Pirate ont demandé l’accès au code source des programmes permettant le vote électronique, ce qui leur a été refusé. Philippe Blanc, autre délégué du Parti Pirate, a conclu : » Nous avons assisté à un cérémonial mis en scène pour donner une impression de sécurité et rassurer les officiels, alors qu’il y a une opacité totale des points clefs. «
Nous reposons donc la question que nous avions posée, après avoir dénoncé l’incroyable nonchalance du décret ministériel encadrant le vote par internet : « Allez-vous vraiment voter sur ce machin ?« .
De son côté, le Parti Pirate n’appelle pas à refuser le vote par internet, mais propose aux électeurs de « témoigner pour rapporter les incidents ou difficultés qu’ils auraient rencontrés« , sur le site conçu à cet effet. « Le code électoral prévoit que les délégués des candidats peuvent consigner dans le procès-verbal du Bureau de vote électronique leurs observations relatives aux opérations du vote par voie électronique. Le procès-verbal est un document public qui sera consulté avant la publication des résultats« , rappelle le Parti Pirate.
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