L’élection présidentielle française ne se jouera vraisemblablement pas sur l’existence très décriée du système des titres électroniques sécurisés (TES) ; non pas que la mise en œuvre d’une base de données centralisée regroupant la totalité des données relatives aux cartes nationales d’identité et aux passeports soit négligeable, mais il y a déjà dans le débat public de nombreux sujets de fond tout aussi légitimes.
Il suffit pour s’en convaincre de consulter le programme des principaux candidats qui ont d’ores et déjà présenté leurs promesses : nous avons épluché les propositions de François Fillon (LR), Benoît Hamon (PS), Marine Le Pen (FN), Yannick Jadot (EELV) et Jean-Luc Mélenchon (FI) sans parvenir à dénicher une position quelconque sur le fichier TES voulu par le ministère de l’Intérieur.
Cette situation agace passablement le Conseil national du numérique (CNNum), qui s’est fortement mobilisé sur la question dès qu’il a eu connaissance de l’existence de ce projet. L’instance consultative a en effet décidé de s’auto-saisir immédiatement, réclamé la suspension du décret donnant naissance au fichier TES, enclenché une consultation publique pour récolter l’avis des Français et publié son avis.
En conséquence, puisque les candidats à l’élection présidentielle ne semblent pas se saisir d’eux-mêmes de la question, le Conseil national du numérique entend les y aider. Dans un communiqué publié cette semaine, l’organisation vient d’appeler les prétendants au poste suprême « à exprimer leur position leur position sur le fichier TES et son évolution à moyen terme, ainsi que sur la construction d’une nouvelle gouvernance des choix technologiques au sein de l’État ».
« L’usage de données biométriques par les autorités judiciaires est un point particulièrement sensible. Au-delà, le débat sur le fichier TES ouvre des questions techniques, organisationnelles, mais aussi éthiques sur la banalisation de la biométrie », note l’instance, qui suggère au futur gouvernement de missionner l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) pour discuter de ces enjeux.
« Une mission associant l’ensemble des parties prenantes (ministère de l’Intérieur, ANSSI, DINSIC, CNIL, laboratoires de recherche, acteurs économiques…) pourrait aussi être lancée pour analyser les alternatives techniques, notamment la conservation des éléments biométriques sur un support individuel exclusivement détenu par la personne, comme recommandé par la CNIL », continue le CNNum.
Un bilan critique sur la sécurité de TES
Le communiqué du Conseil national du numérique survient quelques semaines après les commentaires critiques de deux agences spécialisées de l’État chargées d’évaluer la mise en œuvre et les choix techniques autour du fichier TES. Leur compte-rendu, s’il n’est pas du tout alarmiste, a toutefois pointé un certain nombre de faiblesses et d’améliorations possibles. D’où les « préoccupations » renouvelées du CNNum.
« Les conclusions de cet audit sont incompatibles avec une généralisation à la hâte du système TES », déclare ainsi l’instance, rappelant que le rapport évoque « un certain nombre de vulnérabilités de gravité variable », ce qui est « particulièrement alarmant dans un contexte où les fuites de données sont légion et où la situation géopolitique internationale appelle à redoubler de vigilance quant aux données sensibles de nos concitoyens ».
Publié à la la toute fin du mois d’octobre, le décret du gouvernement donne le coup d’envoi à la constitution d’une base de données qui centralisera les informations personnelles et biométriques de la quasi-totalité des Français. Ce fichier, destiné aux passeports et aux cartes nationales d’identité et censé améliorer la lutte contre la fraude, s’avère toutefois être une vive source d’inquiétude au regard de son ampleur et la nature des données qu’il est amené à recevoir.
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