François Bayrou en sait quelque chose ; en politique il est beaucoup plus facile de grimper au sommet que d'y rester. C'est valable en France comme dans toutes les autres démocraties. En Allemagne, le Parti Pirate est en train de s'écrouler dans les sondages, un an avant les prochaines élections fédérales par lesquelles il espère glaner des sièges au Bundestag.
En avril 2012, le Parti Pirate allemand avait impressionné les observateurs de la vie politique en parvenant à se hisser en troisième position dans les sondages nationaux, devant les Verts. Les Piraten atteignaient alors 13 % des intentions de vote, derrière le SPD (24 %) et la CDU/CSU (36 %).
Avec les élections locales, l'engouement s'était traduit dans les urnes. Entre septembre 2011 et mai 2012, le Parti Pirate a réussi à placer des élus dans les parlements des états-régions de Sarre (7,5 %), de Berlin (9 %), de Schleswig-Holstein (8,2 %), et de Rhénanie-du-Nord-Westphalie (7,6 %), confirmant à chaque fois la place importante prise par le jeune parti politique dans la vie publique allemande.
Mais depuis, la popularité du Piratenpartei Deutschland s'érode. En six mois, il a perdu près de la moitié de son score dans les intentions de vote au niveau national. Tous les instituts placent le Parti Pirate allemand à un niveau situé entre 6 et 7 %.
Vendredi, un nouveau sondage publié par la ZDF a confirmé la tendance, en plaçant le Parti Pirate à 6 % des intentions de vote, son score le plus bas depuis le mois de mars 2012. Doucement mais sûrement, la formation se dirige droit vers un retour sous les 5 %, qui constitue le pallier à franchir pour assurer un siège au Bundestag.
Dans un long article, le Spiegel avance une série de raisons pouvant expliquer l'érosion :
- Une culture du débat interne transparent, qui n'aboutit cependant qu'à des dissensions et aucune prise de position ferme sur les sujets de société qui animent le débat social en Allemagne ;
- Un manque de soutiens de la part des artistes et intellectuels, du fait des positions du Parti sur la réforme des droits d'auteur ;
- Un manque de vision et de stratégie affichées par la direction pour animer de façon cohérente les milliers de soutiens du Parti Pirate ;
- Une crise du financement des campagnes, due notamment au fait que la moitié des 35.000 membres inscrits au Piratenpartei n'ont pas payé leur cotisation annuelle, ou qu'une partie importante des 45 élus du Parti Pirate auraient refusé de verser une contribution financière au parti (sur ce point, il est étonnant que les statuts et les règles d'investitures ne règlent pas la question en amont) ;
- Des affaires qui ont terni son image, comme la découverte du fait que le directeur politique du Parti Pirate finançait son engagement à temps plein par ses indemnités chômage, ou le fait que des élus de Rhénanie-du-Nord-Westphalie ont porté plainte contre le ministre des finances de l'Etat, sans en référer à la direction nationale du Parti, parce que son ministère aurait acheté illégalement un CD contenant des informations sur des fraudes fiscales ;
- Le fait que les électeurs attendent désormais du Parti Pirate qu'il présente un bilan de son activité, maintenant qu'il a des élus dans 4 des 16 parlements régionaux ;
- Les attaques subies par le Parti Pirate par les partis traditionnels allemands, qui ont désormais intégré la formation comme une adversaire à abattre.
- L'essoufflement de l'effet de nouveauté, qui a porté le Parti Pirate dans les médias et dans les urnes, mais qui ne joue plus.
De son côté, le Parti Pirate allemand dit ne pas s'inquiéter, et ne pas porter d'attention particulière aux sondages. Mais s'il échoue l'an prochain, c'est tout l'espoir qu'il a insufflé aux autres Parti Pirate européens qui pourrait disparaître. Sa responsabilité est lourde, et son inquiétude l'est probablement autant.
Seul motif d'espoir : ses adhésions ont explosé en un an, et les militants pourraient avoir un rôle déterminant lorsque le temps de la campagne électorale sera réellement venu.
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