L'opacité du dispositif de rémunération pour copie privée est un sujet qui dépasse les clivages politiques traditionnels. À gauche comme à droite, des députés de la précédente législature comme de l'actuelle ont interpellé à plusieurs reprises le gouvernement pour lui demander de mettre de la clarté dans ce mécanisme. Mais sur ce terrain, le nouveau gouvernement entretient lui aussi un certain flou.
Alors que plusieurs questions parlementaires posées cette année demeurent toujours sans réponse, les services du ministère de la culture se sont arrêtés longuement sur celle adressée en juillet par le député UMP Lionel Tardy. L'élu de la Haute-Savoie voulait savoir "comment le gouvernement entend améliorer la transparence de ces dispositifs et assoir une politique culturelle cohérente et ambitieuse".
"Nombre de rapports continuent de proposer des taxes supplémentaires afin de financer les infrastructures ou la création. Ce constat appelle à une évaluation rapide des dispositifs dans leur intégralité, afin de cerner l'ensemble des revenus prélevés sur le consommateur et le système économique, ainsi que la manière dont ils sont affectés", pointait alors Lionel Tardy.
La réponse est un modèle de hors-sujet. Sur la transparence, pas un mot. La rue de Valois se contente de dérouler un historique des récentes décisions rendues par le Conseil d'Etat, la Cour de justice de l'Union européenne et le Conseil constitutionnel, rappelant au passage les raisons de ce mécanisme, son mode de fonctionnement et les montants dégagés. La question n'avait pourtant pas pour but d'avoir un rappel du rôle de ce dispositif.
"L'enjeu est celui du financement de la création […] Des mécanismes, tels que la taxe sur les services de télévision et la rémunération pour copie privée, convergent dans leurs objectifs puisqu'ils visent tous deux à assurer la rémunération de la création dans l'environnement numérique", explique le ministère de la culture dans sa réponse.
La question soulevée par Lionel Tardy – comme les autres d'ailleurs – est pourtant importante. La rémunération pour copie privée dégage chaque année des sommes importantes, qui sont quatre fois plus élevées que la moyenne européenne, selon le collectif Chère Copie Privée. Trois quarts du prix d'un DVD vierge est composé par ce système, faisant de la France la championne d'Europe.
Or, de nouveaux barèmes avancés par la Commission en charge de la rémunération pour copie privée vont traduire une nouvelle hausse. Les associations et collectifs hostiles à ces barèmes renforcés réclament eux aussi la transparence sur la méthodologie de calcul, une évaluation du préjudice justifiant ces augmentations et l'implication de personnalités qualifiées dans ce travail.
Couvrant de nombreux supports, la rémunération pour copie privée pourrait par ailleurs être étendue à terme aux services en nuage (cloud computing). La SACEM et l'ADAMI sont loin de s'y opposer. S'opérerait alors un changement de paradigme : plutôt que de viser la taxation des supports, d'autant que l'usage professionnel est désormais exclu du champ d'application, ce sont les flux qui seraient concernés.
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