La ministre en charge de l'économie numérique souhaite que le parlement adopte une législation renforçant la protection des données personnelles sur Internet. Elle plaide également pour une meilleure coordination à l'échelle européenne, afin de peser plus efficacement contre les géants du net.

Entre l'affaire du faux bug Facebook, l'audit très critique des nouvelles règles de confidentialité de Google et le développement régulier de la vidéosurveillance, la CNIL a fort à faire pour s'assurer que l'informatique ne porte ni atteinte à la vie privée ni aux libertés fondamentales. Mais le développement rapide de la technologie et l'explosion des services en ligne rendent ce travail difficile.

Afin de soutenir l'action de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, la ministre déléguée à l'économie numérique Fleur Pellerin souhaite que le parlement se saisisse rapidement des problématiques liées à la vie privée et à la protection des données personnelles à l'heure du numérique. Elle suggère ainsi que ce débat s'engage dès l'année prochaine.

"Je pense que nous pouvons nous engager à proposer au Parlement dans le courant de l'année 2013, vraisemblablement au premier semestre, un projet de loi sur ces questions, sur un corpus de règles qui permettrait de garantir la protection des données personnelles et la vie privée sur Internet", a-t-elle déclaré, se prononçant pour une régulation de "ce foisonnement de traitement de données".

Dans son programme numérique pour la campagne présidentielle, le Parti socialiste indiquait vouloir inscrire ou réaffirmer "par la loi les grands principes d'une société de l'information ouverte, comme […] le droit à l'oubli, le droit au respect de la vie privée et à la protection des données personnelles". Mais si un projet de loi voit le jour, la France doit aussi agir en coordination avec ses partenaires européens.

"C'est un sujet européen, il est nécessaire d'avoir une coordination internationale", a-t-elle ajouté devant la commission des Affaires économiques, dans la mesure où les opérateurs de ces services en ligne "peuvent facilement se déplacer" d'un pays à l'autre selon "la taxation ou les niveaux de protection des données personnelles". Une référence implicite aux géants du net établis en Irlande ou au Luxembourg.

L'Union européenne est d'ailleurs en train de plancher sur ces questions, puisque la Commission est en train de réviser la directive 95/46/CE sur la protection des données personnelles. Lorsque le projet sera finalisé, il fixera le nouveau cadre législatif encadrant la vie privée sur la toile. Certaines dispositions avancées par Bruxelles ont néanmoins fait l'objet de critiques, aussi bien en France qu'en Europe.

L'élaboration de ce nouveau cadre et son application concrète seront délicates, non seulement parce qu'il "devra concilier simplification et harmonisation tout en restant fidèle aux valeurs humanistes européennes" mais aussi parce les entreprises voient les données privées comme "le carburant du numérique et veulent continuer à pouvoir les utiliser, a rappelé ce printemps la présidente de la CNIL.

Celles-ci veulent continuer à en jouir en toute discrétion notamment en les monétisant, quitte à élaborer des conditions générales d'utilisation privant les usagers de la propriété de leurs données qu'ils envoient sur un service en ligne. D'autant que les contrats avancés par ces services en ligne sont souvent trop long à lire, avec une formulation parfois absconse.

En marge des révisions législatives à l'échelle nationale mais aussi au niveau continental, une politique engagée en faveur de la protection des données personnelles ne peut pas faire l'impasse sur la question du budget et des moyens humains. La CNIL doit avoir les ressources nécessaires pour mener des enquêtes. En 2012, elle a obtenu une enveloppe de 16 millions d'euros.

Or, l'autorité a mis trois décennies pour atteindre ce budget. En 1978, elle n'avait qu'un million d'euros de budget environ. Forte de 17 commissaires et plus de 160 agents, la CNIL est particulièrement sollicitée :

  • 71 410 traitements déclarés
  • 24 490 courriers reçus
  • 10 000 appels téléphoniques
  • 4821 plaintes
  • 1877 demandes d'accès indirect aux fichiers de police et de renseignement
  • 308 contrôles
  • 111 mises en demeure
  • 3 avertissements
  • 5 sanctions financières
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