L’Allemagne est concernée au premier plan par l’arrivée de migrants venus de pays ravagés par la guerre ou dont la vie est menacée à titre personnel. Après leur avoir ouvert les bras puis fait machine arrière sous l’impulsion d’Angela Merkel, le pays s’apprête à recourir à une technologie d’analyse vocale au cours des prochaines semaines — et à la déployer plus largement en 2018 — pour identifier le pays d’origine des demandeurs d’asile.
En effet, selon le réputé quotidien Die Welt, le Bureau fédéral pour l’immigration et les réfugiés (BAMF) va recourir à cette méthode pour analyser les enregistrements sonores des migrants et mieux traiter leurs demandes d’asile. Ce procédé d’authentification, déjà en vigueur dans les banques et les assurances, doit notamment servir à déterminer si un demandeur d’asile provient bien du pays dont il prétend être originaire, certaines nationalités — comme les Syriens — ayant plus de chances d’obtenir le statut de réfugié au vu de la situation politique de leur pays.
Les fonctionnaires chargés d’évaluer la demande des migrants, qui doivent justifier les menaces dont ils font l’objet dans leur pays d’origine, pourront donc désormais s’appuyer sur cet élément supplémentaire. Julian Detzel, un fonctionnaire du BAMF, précise : « L’idée est d’enregistrer un échantillon sonore des demandeurs d’asile et de le soumettre à une analyse automatique de dialecte. »
Des linguistes sceptiques
L’institution allemande avait estimé l’année dernière que 60 % des demandeurs d’asile n’avait pas de documents d’identifications avec eux, ce qui compliquait énormément leurs demandes. En février 2017, le ministère de l’intérieur a proposé un projet de loi qui permettrait de réquisitionner les téléphones et ordinateurs des migrants pour faciliter leur identification. L’idée avait engendré de vives critiques parmi les défenseurs de la vie privée, qui dénonçaient l’atteinte portée aux données personnelles de leurs possesseurs.
Si l’Allemagne recourt depuis 1998 à des linguistes pour mieux déceler les origines des migrants, plusieurs spécialistes soulignent les risques d’une analyse opérée par un système automatisé. Monika Schmid, professeure de linguistique à l’université d’Essex, explique ainsi au Deutsche Welle : « [Les linguistes] doivent être dotés de grandes connaissances en analyse linguistique et se montrer capables de prendre en compte des facteurs très variés [pour déterminer le pays d’origine]. Je ne vois pas comment un logiciel automatisé peut percevoir si quelqu’un utilise un mot précis ou le prononce d’une manière particulière parce que ça fait partie de son répertoire ou simplement parce que l’interprète ou l’officier l’a incité à le faire. »
Ces inquiétudes sont partagées par Dirk Hovy, informaticien à l’université de Copenhague : « Il est impossible de créer une base de données parfaite puisque la langue évolue constamment. »
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