Alors que Barack Obama évoquait le sujet à la fin de son mandat et qu’en France, Benoit Hamon en a fait un pilier de sa campagne, la question de la raréfaction du travail à cause des robots reste un débat épineux pour les économistes. Une nouvelle étude américaine basée sur une période de 17 ans révèle des chiffres inquiétants.

Objet prisé de science-fiction comme de politique fiction, la raréfaction du travail est un sujet plus que jamais d’actualité. Mais comme toutes questions profondément liées au progrès technologique, elles opposent les croyants et les autres. Entre ceux qui affirment déjà que le monde sera repeuplé de Wall-E et ceux qui ricanent en espérant secrètement que la robotique n’est qu’une mode, il est parfois difficile d’y voir clair. Car face à l’inconnu, nos hommes politiques ont tendance à recourir à des dogmes plutôt qu’à un réalisme bienvenu.

Dans l’Hexagone, depuis que Benoît Hamon a porté le sujet sur la table, l’hypothèse d’un monde sans travail semble être devenue un sujet aussi farfelu qu’une utopie communiste alors même que les promesses de la fin du travail émergent autour de nous, et que Bill Gates suggère lui aussi de taxer les robots. Intelligence artificielle, numérisation, disruption, robotisatio… peu de métiers semblent être à l’abri et personne ne peut nier que dans moins d’un siècle, les taxis seront des robots, les banquiers seront des chatbots et les ouvriers des bras robotiques.

De fait, le débat économique mérite d’être mené et cela avec plus de sérieux que celui que l’on peut observer sur nos petits écrans où l’idée d’un monde robotique apparaît comme le fruit de l’imagination d’un seul homme, Benoît Hamon.

Wall-E

Robots et travail : les preuves de l’impact

Le Bureau de recherches économiques américain a dévoilé ce lundi 27 mars une étude particulièrement intéressante au regard des données collectées, de son regard précis et des réponses concrètes qu’elles apportent à beaucoup de nos questions. Menée par Daron Acemoglu du MIT et Pascual Restrepo de l’Université de Boston, la recherche s’attache à observer l’évolution du marché du travail de 1990 à 2007 dans chaque secteur d’activité qui a été robotisé.

Et la première conclusion est plutôt éloquente : lorsqu’un robot est introduit dans une industrie, il conduit à la destruction de 6,2 postes dans la zone géographique qui l’entoure. Car en plus de remplacer un travailleur, le robot va également avoir des répercussions sur l’ensemble des économies qui dépendent de l’industrie en question.

Une perte comprise entre 0,25 et 0,50 % du salaire moyen

Mais les deux économistes ne se sont pas arrêtés à cette seule observation, ils ont également découvert que la robotisation d’un secteur d’activité entraînait une baisse des salaires dans la plupart des cas. Pour chaque nouveau robot introduit sur le marché du travail pour 1000 travailleurs, c’est une perte comprise entre 0,25 et 0,50 % du salaire moyen qui est observée par les économistes.

Même si l’étude s’intéresse à des secteurs robotisés, nuançons tout de même ce résultat en précisant que d’autres facteurs peuvent rentrer en compte. Toutefois, en s’arrêtant à 2007, les économistes excluent les retombées de la crise économique comme explication possible.

Robot Toyota

CC Blake Read

670 000 emplois disparus en 17 ans

En somme, sur ces 17 années, les Américains ont vu pas moins de 670 000 emplois détruits par la robotique. Le chiffre, par rapport au marché du travail américain, peut paraître anecdotique mais comme le soulignent les chercheurs, le phénomène va en s’accélérant.

Notons également que l’étude s’est concentré sur une définition précise du robot, principalement la robotique industrielle, éloignant donc les distributeurs de billets, les voitures autonomes ou encore les IA du spectre d’observation.

Enfin, pour nous aider à nous projeter dans un monde robotique, les deux économistes mentionnent le désormais célèbre scénario du Boston Consulting Group qui prédit à l’horizon 2025 une multiplication par quatre des robots présents sur le marché du travail.

Si l’on applique à ce scénario les conséquences observées par l’étude sur le salaire et la destruction d’emploi, on obtient un avenir plutôt sombre pour les acteurs les plus fragiles du marché du travail. Un marché qui, malgré les dénégations politiciennes françaises, se verra profondément perturbé, au risque d’emporter avec lui notre modèle social.

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