Pour défendre l'instauration d'un système d'amendes sans sommation remplaçant la loi Hadopi actuelle, l'eurodéputée Marielle Gallo, très proche des milieux culturels, prétend qu'en Allemagne des amendes sont envoyées "dès que vous téléchargez", sans préavis. C'est faux.

Tous les coups sont permis pour défendre le pire des régimes de protection des droits d'auteur sur Internet, y compris le mensonge ou, à tout le moins, la déformation de la réalité.

Dans une interview accordée au Nouvel Obs, l'eurodéputée Marielle Gallo, que l'on connaît bien pour avoir fait adopter au Parlement Européen un rapport très réactionnaire sur la propriété intellectuelle, et qui noue une véritable passion pour la protection des droits d'auteur, a défendu l'idée de remplacer la riposte graduée façon Hadopi par un système beaucoup plus rapide d'amendes sans préavis. Cette position arrive au moment même où, selon nos informations, la mission Lescure et/ou le ministère de la Culture planchent plus que sérieusement sur la possibilité de remplacer la suspension de l'accès à internet par des amendes systématiques, ce qui est demandé avec force par l'ensemble de l'industrie musicale.

Mais pour défendre cette position, Marielle Gallo déforme la réalité en inventant un prétendu exemple allemand qui n'existe pas, ou en tout cas pas sous cette forme. "On critique beaucoup l'Hadopi, mais en Allemagne le système est plus simple : dès que vous téléchargez illégalement, vous recevez une amende, sans avertissement, sans e-mail. Voilà un bon système. Plus simple mais plus radical", affirme-t-elle.

Pas d'amende, mais des menaces amiables

Or c'est faux. Il n'y a en Allemagne aucun système d'amende institutionnalisé par l'Etat ou même par la justice. Comme l'expliquait très bien l'an dernier un article de La Tribune, la justice allemande ne fait qu'autoriser parfois des ayants droit à obtenir directement auprès des FAI l'identité des abonnés à internet dont l'adresse IP est repérée sur les réseaux P2P dans le cadre du partage d'une oeuvre protégée. Ces ayants droit, fort de l'adresse postale de quelques centaines ou milliers d'abonnés, envoient alors à ces derniers des mises en demeure de paiement de dédommagements.

Il ne s'agit donc pas d'amendes, mais de propositions de négociations amiables envoyées par la poste, qui visent à éviter un procès. Procès au bout duquel l'ayant droit devrait démontrer que le téléchargement qu'il prétend faire sanctionner a bien eu lieu, et que l'abonné en est bien responsable. La plupart du temps, l'abonné préfère payer tout de suite que de payer, plus cher encore, des frais d'avocats et d'éventuels dommages et intérêts plus élevés que la somme proposée.

On connaît bien ce système en France, puisqu'il a donné lieu à la sanction d'une avocate par le Conseil de l'Ordre des Avocats de Paris, dans le cadre de l'affaire Logistep / Techland. Et ce système qui s'apparente parfois au racket dans sa mise en oeuvre n'a pas disparu avec la mise en place de l'Hadopi, puisque certains courriers menaçants continuent d'être envoyés à des internautes français pour leur réclamer paiement, le plus souvent pour des films pornographiques (qui veut aller au tribunal pour se défendre du téléchargement d'un film X ?).

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