Dans un rapport sur la lutte contre le streaming et le téléchargement direct (DDL), la Hadopi propose de pouvoir envoyer des avertissements aux plateformes qui ne signent pas d'accords de filtrage avec les ayants droit. Ceux qui n'obtempèrent pas risqueront une saisie de leur nom de domaine et/ou un blocage de leur site par les FAI.

La présidente de la Commission de protection des droits (CPD) de l'Hadopi a publié lundi son rapport (.pdf) sur les moyens de lutte contre le streaming et le téléchargement direct, qui fait suite au très contestable rapport IDATE d'avril 2012. Tout en assurant qu'elle ne délivre "pas de préconisation définitive" contre le streaming et le direct download (DDL), Mireille Imbert-Quaretta y dessine ce que pourraient être les futures préconisations du rapport Lescure, en terme d'évolutions législatives. D'ailleurs, on peut remarquer que cette dernière dit toujours "autorité publique" pour ne pas dire "Hadopi", pour ne pas insulter l'avenir.

Certaines des mesures proposées dans le rapport étaient attendues, comme le fait de responsabiliser les intermédiaires de paiement et les régies publicitaires qui font vivre les sites de streaming et de téléchargement légal, pour couper les flux financiers. Mais la proposition surprise, très détaillée, vise à créer une riposte graduée contre les hébergeurs de contenus et les sites de liens illégaux, qui frapperait aussi les sites légaux.

Ainsi, le rapport de la Haute Autorité préconise dans un premier temps une pseudo "autorégulation" des hébergeurs à qui sont notifiés des contenus illégaux, pour qu'ils ne respectent pas la législation actuelle. En effet, Mireille Imbert-Quaretta regrette que la jurisprudence interprète strictement la loi, et n'oblige pas les hébergeurs à filtrer leurs serveurs pour interdire la mise à disposition de contenus qui ont été déjà été retirés  auparavant, contre d'autres utilisateurs. Elle demande donc à tous les éditeurs et hébergeurs de services internet de prendre exemple sur des sites comme YouTube ou Dailymotion, qui mettent en place des mesures de filtrage pro-actives dans le cadre d'accords commerciaux signés avec les ayants droits ; quand bien mêmes elles posent régulièrement problèmes pour la liberté d'expression.

Mais puisque l'autorégulation a ses limites, et en premier chef la bonne volonté des acteurs, la présidente de la CPD de l'Hadopi propose que "l'autorité publique" (Hadopi ou autre) se pose en juge de paix, et surtout en redresseur de torts. 

Signer un accord privé, ou risquer blocage et saisie de nom de domaine

Ainsi, "contrairement à l’idée parfois évoquée de confier à l’autorité publique le soin de notifier elle-même les demandes de retrait aux plateformes, l’option envisagée serait de faire intervenir l’autorité dans un second temps, lorsque les contenus illicites réapparaissent". Ainsi saisie par les ayants droit, l'administration pourrait "notifier à la plateforme le manquement constaté" qui "déclencherait une procédure contradictoire" qui obligerait la plateforme à s'expliquer sur son refus de mettre en place un filtrage.

"Un tel mécanisme permettrait d’apprécier si la présence du contenu est liée à une négligence de la part de la plateforme ou si elle résulte des limites des technologies de reconnaissance de contenus", explique le rapport, dont les mots rappellent la négligence caractérisée qui sert de base juridique à la riposte graduée.

"Dans l’hypothèse où il ne serait pas possible de parvenir à un accord en raison de la mauvaise volonté manifeste de la plateforme hébergeant les contenus notifiés" de faire ce que la loi et la jurisprudence n'imposent pas (sic), "l’autorité publique pourrait décider de rendre public le comportement de cette plateforme dans le cadre d'une procédure d’alerte".

Il ne s'agirait pas de mettre simplement au pilori la plateforme qui refuse de filtrer d'un commun accord avec les ayants droit, mais bien de menacer. Ainsi, "on peut envisager le blocage du nom de domaine d’un site [de liens] qui aurait fait l’objet de la procédure d’alerte", prévient Mireille Imbert-Quaretta, qui est aussi favorable au blocage des sites par les FAI et par les hébergeurs. Ainsi, outre la saisie des noms de domaine, la procédure de notification pourrait "constituer une nouvelle base à la saisine du juge d’une demande de blocage par l’autorité publique".

Le livre vert de la Hadopi sur le filtrage et le blocage, qui avait été très critique, n'est évoqué que par une note de bas de page en début de rapport. Il n'y sera plus jamais fait mention. En revanche, MIQ propose que l'autorité publique puisse "se voir confier par le juge, selon des modalités précisément définies, le suivi de l’exécution des décisions de blocage qu’il aurait ordonnées", avec dans l'idée d'utiliser un logiciel fourni par TMG pour appliquer une mise à jour automatique du filtrage contre les miroirs.

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