En charge du redressement productif, Arnaud Montebourg a défendu la "démondialisation des données personnelles", qui consiste à rapatrier en France le stockage et le traitement des données personnelles des Français. Pour obliger les géants américains à suivre ce principe, le ministre plaide pour une action à l'échelle européenne.

Avec la démocratisation de l'informatique en nuage, de nouvelles problématiques liées à la souveraineté des données se font jour. Les principaux prestataires sont américains ; dès lors, comment être certain de la confidentialité des informations stockées sur leurs serveurs, alors que le Patriot Act laisse toute latitude au gouvernement américain pour mener des inspections ?

La souveraineté en matière de cloud computing est un sujet que les Pays-Bas prennent manifestement au sérieux, en envisageant d'interdire à l'administration de faire appel à des groupes américains proposant des services en ligne chargés d'héberger des données. C'est également un sujet considéré avec attention dans l'Hexagone, au regard des sommes investies dans une future plateforme nationale.

Chantre de la démondialisation et partisan du made in France, Arnaud Montebourg est évidemment sensible à ces problématiques. À l'occasion d'un entretien accordé à 20 Minutes, et alors que le gouvernement sort d'un séminaire sur le numérique, le ministre du redressement productif a évoqué plusieurs pistes pour relocaliser l'hébergement des données françaises dans l'Hexagone.

La stratégie du gouvernement en la matière est de "défendre la souveraineté économique et numérique" de la France. L'idée n'est donc "pas d'interdire l'exploitation des données personnelles, mais de faire en sorte qu’elle ait lieu sur le territoire où habitent les personnes dont les données sont exploitées", explique Arnaud Montebourg au quotidien.

Le ministre propose donc la mise en place "d'une stratégie de localisation des data centers [et] des emplois rattachés à l'exploitation des données personnelles sur le territoire européen et particulièrement français". Il ne s'agit pas d'un plan compliqué, selon le ministre, mais d'un principe simple : "toute donnée collectée en Europe doit être stockée et traitée en Europe".

Mais il ne suffit pas qu'Arnaud Montebourg réclame la "démondialisation des données personnelles" pour que celle-ci devienne réalité. Comment obliger Google, Facebook, Microsoft, Amazon et tous les autres géants américains à héberger et traiter les données des Européens en Europe ? Le ministre sait que le dossier doit être traité au niveau communautaire (une consultation publique avait été lancée).

"Nous allons porter la voix de la France au niveau européen pour défendre [ce] principe simple. […] Il suffit pour cela que les États s’affirment à la fois au niveau national et au niveau européen". "Ce que l’on veut, c’est qu’ils respectent les données personnelles de chaque Français et que la valeur associée à ces données soit d’abord exploitée en France ou en Europe".

La relocalisation de l'hébergement et de l'exploitation des données personnelles des Français dans l'Hexagone répond aussi à des projets fiscaux. Le rapport Collin & Colin (.pdf) sur la fiscalité du numérique, dans lequel Pierre Collin et Nicolas Colin proposent de mettre en place une taxation modulable des données personnelles. Cette piste, la CNIL l'observe avec intérêt.

Arnaud Montebourg ne cache pas d'ailleurs que le rapatriement des données personnelles vise aussi à récupérer leur valeur. "Est-ce que nous récupérons nos données personnelles au lieu de les laisser exploitées par d’autres ? C’est une captation de valeur qu’il faut récupérer au nom de la souveraineté économique et numérique des Européens", conclut-il.

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