On dit d’Emmanuel Macron qu’il est en train d’« américaniser » la pratique du pouvoir en France. Mais le président élu bouscule aussi la manière de communiquer. On a pu le voir pendant la campagne avec une séquence à haut risque lors d’un déplacement à l’usine Whirlpool d’Amiens, lorsqu’une vidéo a été diffusée en direct par son équipe sur Facebook Live. Signe du changement d’époque, la chaîne de télévision BFM TV a préféré éteindre ses caméras et retransmettre le flux à la place.
Cette volonté de s’emparer des outils qu’offre le numérique pour propager la parole politique sans avoir besoin de recourir aux médias se vérifie encore aujourd’hui. En effet, Emmanuel Macron a diffusé mardi 9 mai une vidéo sur sa chaîne YouTube dans laquelle il célèbre l’Europe et appelle à la refondation de l’Union européenne. Il aurait pu discourir sur TF1 ou France 2 mais non. Pour sa première intervention « télévisée » post-élection, c’est sur le web que le nouveau président s’exprime.
Bien sûr, Emmanuel Macron n’est pas le premier à utiliser le web à des fins politiques. Lors de la campagne, plusieurs candidats — ou leurs soutiens — ont employé avec plus ou moins d’aisance les réseaux sociaux et les sites communautaires pour défendre leurs idées, tacler celles des autres et commenter plus généralement l’actualité. À ce petit jeu, c’est sans aucun doute Jean-Luc Mélenchon qui a été le plus doué, aidé par des militants très mobilisés et un effort soutenu pendant des mois.
Mais l’on pourrait également citer Florian Philippot, bras droit de Marine Le Pen, qui a aussi lancé une chaîne YouTube, tout comme Nicolas Dupont-Aignan, qui a opté pour ce canal pour s’adresser directement aux Français, sans le filtre médiatique que nombre d’entre eux critiquent, mais dont ils ont toujours besoin. dans un souci de communication horizontale avec le public, c’est-à-dire d’égal-à-égal, et non pas dans un rapport vertical, où l’un à l’ascendant sur l’autre.
Appropriation hésitante de YouTube
Ces prises de parole en singeant les codes de YouTube ne sont évidemment pas sans risque. Si certaines personnalités s’en tirent plutôt bien, comme Jean-Luc Mélenchon, l’exercice est beaucoup plus laborieux pour d’autres. Cela n’a d’ailleurs pas échappé à certains vidéastes, qui se sont fait un malin plaisir à tourner en dérision ces youtubeurs amateurs. La chaîne de Mister JDay a ainsi complètement démoli la communication de Nicolas Dupont-Aignan et a aussi bien taclé celle d’Emmanuel Macron.
Quoiqu’il en soit, Emmanuel Macron s’est prêté à cet exercice à diverses reprises, au fil de la campagne. Mais à l’époque, il n’était encore que candidat. Il ne portait aucune parole officielle. N’avait aucune fonction particulière. N’était investi de rien, sinon du soutien de son réseau de militants. Or cette fois, cette prise de parole sur YouTube se fait en tant que président élu de la République. C’est un changement de paradigme et une première dans l’histoire française.
En cela, Emmanuel Macron est bien plus proche d’un Obama, qui n’a pas hésité par exemple à utiliser YouTube pour s’adresser directement à la population iranienne, dans l’espoir d’éviter la censure du régime, que d’un Hollande, qui est complètement passé à côté de cette possibilité. Il suffit de parcourir son compte officiel, celui de l’Élysée sur Dailymotion, pour s’en convaincre : il se contente de relayer ses discours à la télévision ou la radio.
Son prédécesseur, Nicolas Sarkozy, a pour sa part été davantage un précurseur en la matière puisqu’il a commencé dès 2014 à commencer à tourner des vidéos pour s’adresser aux internautes. Mais le contexte était là aussi particulier : l’ancien chef de l’État n’était plus en exercice depuis longtemps, contrairement à Emmanuel Macron, dont le mandat commence à peine. Il reste évidemment à savoir si cette manière de faire se poursuivra tout au long des cinq ans ou si ça ne sera qu’un feu de paille.
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