Décidément, la Direction Centrale des Renseignements Intérieur (DCRI) n'a que faire d'engendrer un effet Streisand sur les documents qu'elle aimerait cacher. Alors qu'elle sort à peine du scandale suscité par les pressions qu'elle a exercée sur un bénévole de Wikipedia pour obtenir le retrait d'un article (avec pour seul résultat sa traduction dans une multitude de langue et sa mise en évidence médiatique), ce qui vaut désormais au ministère de l'intérieur de devoir s'expliquer sur les méthodes des anciens RG, la DCRI s'attaque de nouveau à la publication sur internet d'informations jugées confidentielles par l'Etat.
En effet, Rue89 révèle que deux journalistes du défunt site Owni, Andrea Fradin et Pierre Alonso, ont été convoqués dans les bureaux parisiens de la DCRI, dans le cadre d'une enquête préliminaire ouverte "à la demande du parquet. Selon nos confrères, même si le motif de la convocation n'est pas signifié aux deux journalistes, c'est cet article du 13 septembre 2012 révélant le projet d'une "plateforme nationale d'interception judiciaire" (PNIJ) qui leur vaudrait de devoir s'expliquer, avant une éventuelle mise en examen – ils sont pour le moment convoqués en qualité de témoin.
Le but de la PNIJ, selon Owni, est de "concentrer en un même endroit, tenu (évidemment) secret, toutes les demandes de policiers, gendarmes et douaniers visant à surveiller ou consulter les communications téléphoniques ou électroniques d’un individu", "ainsi (évidemment) que les données résultant des écoutes, relevés de géolocalisation, suivi de navigation sur Internet – entre autres joyeusetés".
A l'appui de leur article, très fouillé, les deux journalistes avaient publié un document de 2009 estampillé "confidentiel-défense" (le niveau le plus bas dans la classification des informations protégées), qui détaillait le projet de la PNIJ dans ses objectifs et ses processus. Il s'agissait du document dit de "programme fonctionnel détaillé", envoyé aux candidats retenus à l'appel d'offres. Deux semaines après la publication de l'article, le document avait été retiré de la plateforme Scribd qui l'hébergeait, officiellement pour violation de droits d'auteur. Mais Owni en a conservé une copie en PDF, dont il est évident qu'elle circulera désormais beaucoup plus qu'au moment de la publication de l'article, qui n'avait reçu qu'assez peu de relais.
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