La nouvelle riposte graduée imaginée par Pierre Lescure n'a pas vocation à durer éternellement. L'ancien président de Canal+ envisage même sa disparition d'ici trois à cinq ans, si tout se passe bien. Mais quoi qu'il arrive, la législation restera lourdement armée pour s'attaquer aux pirates.

Dans son rapport sur les politiques culturelles à l'ère numérique, Pierre Lescure propose de confier les attributs de la Hadopi au CSA. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel, selon la vision de l'ancien président de Canal+, devra s'occuper observer les pratiques culturelles en ligne, réguler les mesures techniques de protection et mettre en œuvre la riposte graduée.

Mais le nouveau dispositif, ajusté pour l'occasion, n'a manifestement pas vocation à durer indéfiniment. L'objectif est d'accompagner temporairement les internautes afin que ces derniers adoptent de bonnes pratiques sur la toile. En filigrane, il faut comprendre que le mécanisme veut pousser les Français à revenir dans les clous de l'offre légale, qui d'ici là devra encore s'améliorer.

Se projetant dans un hypothétique futur, Pierre Lescure explique qu'à moyen terme, la "démarche pédagogique" de la riposte graduée façon CSA "devrait, si son efficacité se confirme, conduire à un recul des pratiques illicites en cause". Or, puisque ce système "n'a pas vocation à constituer un dispositif pérenne", le rapport envisage "un démantèlement de la réponse graduée d'ici trois à cinq ans".

Bien entendu, cette perspective ne se réalisera que si les résultats escomptés sont constatés dans les faits, via une "diminution du nombre d'infractions détectées et donc une baisse du nombre d'avertissements envoyés", en partant du principe que cette baisse signifie un basculement vers l'offre légale et non un déplacement des usagers vers d'autres formes d'échange (streaming, téléchargement direct, réseaux privés…).

Le délit de contrefaçon demeure

Mais même à supposer que la riposte graduée gérée par le CSA disparaisse, le délit de contrefaçon demeurera. Car en effet, le nouveau dispositif imaginé par Pierre Lescure n'a aucunement pour objectif de se substituer à un autre dispositif. C'est exactement comme du temps de la Haute Autorité. La riposte graduée vient compléter l'action pénale.

"Les ayants droit conservent la possibilité de poursuivre en contrefaçon les internautes qui téléchargent illégalement sur les réseaux P2P". Et les sanctions maximales restent gigantesques : 3 ans de prison et 300 000 euros d'amende. Lorsqu'elles sont commises en bande organisée, les peines grimpent à 500 000 euros d'amende et 5 ans de prison.

Cependant, il n'est manifestement pas question de cibler l'internaute du dimanche avec ce mécanisme. C'est du moins le souhait de Pierre Lescure, qui souhaite que les parquets n'engagent "des poursuites pour contrefaçon que lorsqu’il existe des indices sérieux et concordants tendant à prouver l’existence d’un enrichissement personnel ou collectif, dans le cadre d’un réseau contrefaisant".

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