L’opération, qui n’a pas été montrée à la télévision lors de la retransmission du Grand Prix de Belgique, avait été soigneusement préparée. Plusieurs semaines avant l’arrivée des formules 1 à Spa, des bénévoles de Greenpeace se sont infiltrés sur le circuit pour installer au pied du podium deux bannières motorisées et radio-commandées. Elles ont été déployées dimanche au moment où Sebastian Vettel fêtait sa victoire, pour attirer l’attention du public sur les risques écologiques posés par les projets de forages pétroliers en arctique. Shell, principal sponsor du Grand Prix et promoteur du projet de forage, était directement et nommément visé.
Si la séquence n’a pas été diffusée à la télévision, grâce sans doute à un léger différé de réalisation, l’association Greenpeace a elle-même filmé la séquence avec sa propre caméra et a diffusé la vidéo sur YouTube. Succès garanti. Le jour-même, l’opération a été vue plus de 200 000 fois sur le site de partage de vidéos.
Mais lundi, YouTube a supprimé l’accès à la vidéo. Selon Greenpeace, c’est pour des motifs de violation du droit d’auteur que la vidéo aurait été censurée, à la demande de Formula One Management (FOM), qui organise le Grand Prix. L’association y voit bien sûr la main de Shell, qui aurait voulu censurer la séquence que personne n’avait vue en direct.
Greenpeace contre les abus de propriété intellectuelle
Sur YouTube, la page où figurait la vidéo indique qu’elle est désormais « privée », comme si elle avait été retirée par Greenpeace elle-même. Le traditionnel message accompagnant les retraits pour violation de droits d’auteur ne figure pas sur la page. Peut-être Greenpeace a-t-elle simplement préféré supprimer la vidéo plutôt que d’être ainsi publiquement accusée de contrefaçon
(Mise à jour : l’association nous confirme que le premier message était explicite avant que la vidéo ne soit complètement désactivée :
)
« Ce ne serait pas la première fois qu’une société essaye de réduire au silence une parodie de Greenpeace ou un article critique, en affirmant qu’ils possèdent leur nom et donc tout contenu qui en fait mention« , raconte l’association. En 2010, Nestlé avait en effet fait supprimer de YouTube une campagne de vidéos de Greenpeace contre Kit Kat, accusé d’accentuer la déforestation en Indonésie (pour l’huile de palme), ce qui avait eu l’effet inverse à celui escompté par la firme.
Paranoïaque ou volontairement excessif, Greenpeace conseille à ses soutiens de ne pas faire de lien vers sa vidéo, parce que « des millions d’entre nous pourraient être accusés de violation de droits d’auteur, et Shell a gagné suffisamment d’argent en détruisant notre planète pour poursuivre, potentiellement, chacun d’entre nous« . L’association fait de cette nouvelle affaire une démonstration supplémentaire de l’exploitation néfaste des droits de propriété intellectuelle. « Mais il faut aussi noter que procès après procès, notre droit à la liberté d’expression a toujours triomphé chaque fois qu’il a été mis à l’épreuve par une entreprise géante se croyant capable de réduire au silence la critique avec le droit sur les marques« , écrit Briand Fitzgerald, le responsable de la communication en ligne de Greenpeace.
Il demande que les internautes restent « vigilants » pour lutter contre toutes les tentatives, notamment législatives, de renforcer les droits de propriété intellectuelle.
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