Les outils de ciblage publicitaire disponibles sur Facebook ne sont pas seulement prisés des marques et des entreprises : les partis politiques y recourent aussi pour mener campagne. À la veille des élections législatives anticipées, un député conservateur britannique s’inquiétait d’ailleurs du manque d’encadrement des publicités politiques ciblées, qui pouvaient selon lui facilement virer à la fake news en l’absence de contrôle.
La nature particulière de ces « publicités » intéresse de nombreux chercheurs en science politique ou en communications, qui aimeraient en connaître de multiples éléments : le nombre d’utilisateurs qui ont cliqué, l’impact selon les catégories démographiques, le degré d’apparition des publications, l’argent investi dans les campagnes, etc.
Mais ils ne risquent pas d’y avoir accès : Facebook a fait savoir qu’il ne souhaitait pas partager ces données. Rob Sherman, responsable des données personnelles du réseau social, justifie ce choix en rappelant que l’entreprise applique la même règle aux campagnes publicitaires commerciales, dont les détails restent seulement connus de Facebook (et du client) : « Nous tentons de maintenir des règles cohérentes sur toute la plateforme, ce qui nécessite d’imposer les mêmes prérequis à tout le monde. »
Les clients préfèrent eux aussi conserver le secret
Rob Sherman reconnaît que cette décision arrange clairement les clients du service : « Les publicitaires considèrent que leurs créations publicitaires et leur stratégie [en la matière] sont des sujets concurrentiels sensibles et confidentiels. Dans la plupart des cas, ils nous demandent, comme condition préalable de diffusion sur Facebook, de ne pas révéler les détails de leur campagne. » L’équipe de Donald Trump — qui est le premier à affirmer que les réseaux sociaux ont joué un rôle dans sa victoire à la présidentielle — aurait ainsi dépensé 70 millions de dollars pour ses seules publicités ciblées sur Facebook.
Les chercheurs en science politique soulignent à l’inverse que la nature sensible de ces campagnes politiques numériques devrait justifier d’un traitement particulier alors qu’elles sont en passe de remplacer les traditionnels spots télévisés aux États-Unis. La transparence permettrait de s’assurer que ces ciblages d’électeurs potentiels se font dans le respect des règles nationales, sans s’appuyer, notamment, sur des arguments clairement mensongers, ou encore en ciblant certaines catégories de population pour en exclure d’autres, selon leur couleur de peau.
L’exclusion possible des Afro-Américains et des Hispaniques dans les paramètres des publicités ciblées a fait scandale
Facebook avait fait scandale en octobre dernier, quand ProPublica avait révélé que certaines annonces d’emploi ou de logement publiées sur la plateforme ciblaient — comme leur permettait l’outil — des clients potentiels en excluant volontairement les Afro-Américains et les Hispaniques de leur liste de destinataires. Une pratique bannie depuis par l’entreprise. Une enquête interne du réseau social a par ailleurs établi qu’il avait fait l’objet de campagnes de désinformation publiques pendant la présidentielle américaine.
Daniel Kreiss, professeur à l’université de Caroline du Nord, est convaincu de la nécessité d’une telle transparence : « Les candidats peuvent dire ce qu’ils veulent. Disposer d’une sorte de répertoire numérique des publicités achetées pendant une période particulière et en provenance d’une source spécifique serait aussi démocratique que bienvenu pour le public. » Facebook n’est visiblement pas près de céder, préférant cultiver le secret, et ce alors que la révélation de ses règles de modération pour le moins douteuses a fait polémique fin mai 2017.
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