Hobby très populaire, le jeu vidéo fait l'objet depuis plusieurs années d'une attention toute particulière. En effet, l'immersion toujours plus grande permise par les avancées technologiques, le réalisme croissant des graphismes et l'engagement du joueur sur certains titres conduisent désormais les scientifiques et les psychiatres à s'interroger sur les effets, s'ils existent, de ce divertissement.
Il existe d'ores et déjà de nombreuses études sur ce terrain, réalisées dans le monde entier. Or, leurs conclusions sont loin de dire la même chose : certaines ne voient aucun lien avéré de causalité entre la pratique du jeu vidéo et une évolution du comportement, de l'état d'esprit ou des capacités cognitives. D'autres soulignent des effets bénéfiques pour le développement personnel, les autres affirment le contraire.
Des effets positifs évoqués dans une étude
La dernière en date a été conduite par Isabela Granic, doctorante, et ses collègues de l'université Radboud de Nimègue (Pays-Bas). L'étude, publiée prochainement dans la revue American Psychologist, note que la pratique du jeu vidéo, même violent, serait bénéfique pour le développement général de l'enfant, en stimulant notamment son apprentissage, sa bonne santé et ses compétences sociales.
L'étude néerlandaise synthétise au passage les points positifs relevés dans d'autres travaux scientifiques. Les jeux de tir, par exemple, auraient un effet positif sur la navigation spatiale, le raisonnement, la mémoire et la perception. Les jeux en ligne, du fait de leur caractère social (Farmville ou World of Warcraft), offrent l'occasion d'interagir avec autrui, malgré la séparation de l'écran.
Chaque joueur est différent. Chaque relation au jeu vidéo aussi
Naturellement, les éléments de l'étude néerlandaise sont rapportés au conditionnel. Autrement dit, les effets bénéfiques ne se constatent pas nécessairement chez tous les joueurs. D'autres facteurs entrent indéniablement en ligne de compte, exactement lorsqu'il s'agit de débattre des effets des jeux vidéo violents sur ceux qui s'y adonnent. C'est ce que relevait le psychologue Pascal Minotte.
"Il n’y a pas d’effet absolu et universel des pratiques vidéoludiques ou d’internet et de la violence qu’ils peuvent contenir. Chacun, en fonction de son histoire, du contexte relationnel et familial dans lequel il vit, des règles et des limites qu’il a reçues et intégrées, de ses capacités à mettre en mots etc. en fera quelque chose de singulier, destiné à évoluer avec le temps", écrivait-il.
La tentation de clouer au pilori les études négatives et porter au pinacle les études positives
Plus direct, le professeur de psychologie sociale Laurent Bègue, auteur d'une étude pointant "les effets à long terme des jeux vidéo violents", s'étonnait pour sa part que les joueurs validaient toujours aveuglément les études positives sur le jeu vidéo, sans jamais discuter de la méthodologie, et se montraient intraitables concernant les travaux ayant une conclusion négative.
"Les bénéfices imputés au jeu vidéo recueillent toujours un assentiment quasi-automatique. […] De nombreux joueurs montent au créneau parce qu’ils pensent que les recherches sont insuffisantes pour se permettre d’affirmer que certains des jeux qu’ils apprécient ne soient pas nécessairement anodins", écrivait-il, regrettant le réflexe pavlovien des joueurs.
Les jeux vidéo… et l'écran en général
En fin de compte, à défaut de pouvoir arrêter une opinion définitive sur le sujet, plusieurs voix suggèrent une pratique raisonnée et raisonnable du jeu vidéo, en élargissant le sujet aux écrans en général.
Ainsi Serge Tisseron, psychiatre et psychanalyste, propose ainsi la règle des 3-6-9-12 : pas d'écran avant l'âge de trois ans, pas de console avant 6 ans, pas d'Internet avant 9 ans, pas d'Internet seul avant 12 ans. Une position partagée en partie par le philosophe Bernard Stiegler, qui déconseille aux parents de placer trop tôt leurs enfants devant un écran.
De son côté, et bien que contestée, l'Académie des sciences écrit que "s'agissant des jeux vidéo, une distinction entre les pratiques excessives qui appauvrissent la vie des adolescents et celles qui l’enrichissent est indispensable" et que "les jeux vidéo – et la réalité virtuelle de façon générale – peuvent constituer un support dans de nombreuses formes de prises en charge" face à des pathologies.
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