L'existence des nombreux programmes de surveillance employés par les agences de renseignement occidentales, dévoilée suite à l'action d'Edward Snowden, pour surveiller les communications électroniques et téléphoniques du monde entier n'a pas seulement heurté l'opinion publique. Elle a également suscité l'ire de quelques gouvernements, à commencer par le Brésil.
Alors que la presse internationale continue de décortiquer les documents confidentiels dérobés par l'ancien analyste de la NSA, une offensive diplomatique s'est engagée cet automne à l'ONU. Plusieurs pays ont tenu à mobiliser les Nations Unies pour défendre le droit à la vie privée, dénoncer l'espionnage de masse et encadrer la collecte des données personnelles.
Or, le bilan de cette offensive est pour l'instant bien mince, même si selon les standards de la diplomatie, les lignes ont quelque peu évolué. La troisième commission de l'ONU, qui traite notamment des questions liées aux droits de l'Homme, s'est effectivement penchée sur le droit à la vie privée à l'ère numérique. Un texte a été adopté mardi comme le signale Jean-Marc Manach sur Twitter.
La résolution onusienne
Que dit cette résolution adoptée par la troisième commission ? Que "les droits dont les personnes jouissent hors ligne doivent également être protégés en ligne, y compris le droit à la vie privée". Elle invite l'Assemblée générale de l'ONU à demander aux États "de respecter et de protéger le droit à la vie privée, notamment dans le contexte de la communication numérique".
Les nations du monde devraient aussi, selon cette résolution, "revoir leurs procédures, leurs pratiques et leur législation relatives à la surveillance et à l’interception des communications, et à la collecte de données personnelles, notamment à grande échelle, afin de défendre le droit à la vie privée en veillant à respecter pleinement toutes leurs obligations au regard du droit international".
La troisième commission ajoute que "des mécanismes nationaux de contrôle indépendants efficaces" devraient voir le jour afin "d'assurer la transparence de la surveillance et de l’interception des communications et de la collecte de données personnelles qu’ils effectuent, le cas échéant, et veiller à ce qu’ils en répondent, ou à les maintenir en place s’ils existent déjà".
Une résolution non contraignante
Rédigée ainsi, la résolution paraît tout à fait satisfaisante. Comment, en effet, s'opposer aux propositions de la troisième commission ? Or, c'est bien là tout le problème : c'est une résolution consensuelle qui a soigneusement évité les sujets qui fâchent : point de dénonciation de l'espionnage ici, mais de simples formules générales sur la vie privée.
Comme le pointe Radio-Canada, la résolution a été édulcorée. Les pays très actifs dans l'espionnage électronique (les "Five Eyes", à savoir les États-Unis, la Grande-Bretagne, l'Australie, le Canada et la Nouvelle-Zélande) ont mis leur poids diplomatique dans la balance pour aboutir un texte allégé. Ce n'est qu'ensuite que ces derniers ont soutenu le texte.
Évidemment, cela n'a pas empêché quelques déclarations une fois l'adoption de la résolution actée. "Le droit à la vie privée et le droit à la liberté d’expression doivent être respectés en ligne et hors ligne", a déclaré par exemple le représentant américain. La résolution sera-t-elle suivie par l'Assemblée générale ? Vu son propos très général, peut-être. Elle n'est en tout cas pas contraignante.
( photo : CC BY-SA Patrick Gruban )
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