Les exactions commises par la Corée du Nord contre son propre peuple peuvent-elles être documentées grâce à l’imagerie satellite, puisqu’il est extrêmement difficile et risqué de procéder à des vérifications sur place ? C’est ce que s’efforce de faire l’ONG Transitional Justice Working Group (TJWG) avec la publication, mercredi 19 juillet, de son premier rapport basé pour partie sur la photographie spatiale.
Du fait de la répression implacable qu’exerce le régime, la mobilisation des satellites a du sens pour avoir un aperçu de ce qui se passe au sol. Comme il est impossible de se déplacer librement dans le pays et que chaque étranger est systématiquement accompagné de deux « guides », autant passer par les airs — ou plutôt par l’espace –, là où Pyongyang n’est pas en situation d’agir.
Le pouvoir de Kim Jong-Un a beau faire des efforts énormes pour verrouiller le pays, il n’a pas les moyens d’empêcher les autres États de faire passer des satellites au-dessus de son territoire à plusieurs centaines ou milliers de kilomètres d’altitude. Tout ce qu’il peut faire, c’est de cacher ses activités, que ce soit en les enterrant ou en les cachant dans des hangars.
Dans le cadre de son travail, l’organisation TJWG ne s’est pas contentée de regarder avec attention toutes les images satellitaires de la Corée du Nord pour essayer de repérer les endroits suspects, que ce soit des fosses communes, des chambres à gaz et tout autre site où les droits de l’homme sont bafoués. En fait, le service a surtout servi de support aux témoins qui ont pu fuir le pays.
En effet, le rapport explique comment des entretiens avec des transfuges ont permis de localiser les sites en utilisant Google Earth. Et si le rapport ne donne pas avec précision la liste des lieux suspectés d’accueillir des tombeaux à ciel ouvert ou des camps d’extermination (l’organisation estime que cela pousserait Pyongyang à faire le ménage), il donne toutefois des renseignements généraux par région.
Le rapport apporte toutefois d’autres éléments, en particulier sur sa méthodologie et sur la manière dont la fiabilité des témoignages est évaluée. Il indique également quelques sites sur une carte qui pourraient contenir des preuves des abus de la Corée du Nord, comme des emprises gouvernementales, des postes de police ou des bases militaires. Preuves qui sont pour l’heure complètement hors d’atteinte.
Nouveaux usages
Le travail effectué par TJWG reste en tout les cas un bon exemple sur la manière dont des technologies peuvent aider à faire éclater la vérité sur des faits qu’un pouvoir, en l’espèce dictatorial, cherche à nier — ce que Pyongyang passe son temps à faire lorsque le sujet est évoqué aux Nations Unies par exemple. Mais il n’est pas certain qu’un tel rapport réussisse à faire bouger les lignes.
L’usage de Google Earth pour mettre en lumière les crimes de la Corée du Nord rappelle des utilisations assez similaires de l’imagerie satellite :
On se souvient par exemple des internautes qui avaient essayé en 2014 de localiser de cette façon les débris du vol Malaysia Airlines MH370 ou bien de cette université anglaise qui s’en sert pour lutter contre l’esclavage moderne. Citons aussi le projet porté par le site GlobalXPlorer, qui propose d’exploiter l’imagerie satellite à des fins archéologiques en faisant appel à la contribution des internautes.
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