Le rapport sénatorial sur la chronologie des médias dévoilé à la presse ce matin propose une retranscription des échanges entre les sénateurs, menés par les grands acteurs français et la centriste Mme Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.
Après l‘échec des négociations, le Sénat mise sur un ultimatum législatif prévu pour 2018 si aucun accord n’est trouvé d’ici là par le secteur.
Netflix et Amazon absents des discussions
Au fil de ces digressions entre Canal+, CNC, Orange, Altice, TF1 ou encore la SACD et les élus, on trouve des centaines de mentions de Netflix. La présidente va même jusqu’à introduire son travail en mentionnant la polémique explosive provoquée par le géant de la SVoD à Cannes. Pourtant, on découvre, à la 39e page du rapport que les principaux intéressés sont absents. Mme Morin-Dessailly lâche en effet : « Nous aurions aimé auditionner Netflix ou Amazon, mais nous n’avons pas pu les convaincre. »
La suite semble forcément beaucoup dépendre de cette absence des « agitateurs » du modèle de production français. Tour à tour accusés de tous les maux, les deux géants du web apparaissent dans la suite des interventions comme les grands méchants loups d’un modèle qui, à en croire certains, semblait aller très bien jusque-là.
« Nous aurions aimé auditionner Netflix ou Amazon, mais nous n’avons pas pu les convaincre. »
Les chaînes, notamment Canal +, expliquent aux sénateurs que les deux Américains ne financent pas la création. Une attaque déjà dénoncée par Ted Sarandos de Netflix, qui, libéralisme oblige, ne souhaite pas de quotas mais promet un investissement européen avec Marseille, Osmosis ou encore de prochaine séries allemandes et espagnoles.
Parmi les propositions sur lesquelles les sénateurs voudraient que le cinéma français avance avant la fin de l’année — sous peine de passer par un coup de menton législatif –, on trouve surtout des ajustements des fenêtres d’exploitation dédiées aux chaînes.
Un ultimatum pour le cinéma français
Les chaines câblées pourraient ainsi gagner une fenêtre à partir de six mois après la sortie d’un film, contre dix aujourd’hui. La VOD gagnerait un mois d’avance et proposerait, à l’américaine, une sortie à trois mois après diffusion.
Les gratuits ne sont pas en reste non plus : replay des films, multidiffusion, fin des jours interdits (le mercredi et le samedi soir), ouverture de la pub pour le cinéma à la télé, 3e coupure publicitaire pour les films dépassant les 1h45, et mutualisation de l’obligation de de financement au niveau des groupes TV et non des chaînes.
En matière de SVoD, le rapport fait la distinction entre plateformes « vertueuses » et les autres, les Américaines. Les sénateurs expliquent : « La détermination de la fenêtre dont pourraient bénéficier les plateformes ‘vertueuses’ doit dépendre de la nature des engagements pris. Toutefois, on ne peut exclure que les acteurs qui contribueraient autant que les chaînes payantes au financement des œuvres se voient reconnaître des conditions comparables pour leur exploitation. »
En somme, le Sénat semble vouloir rapprocher les plateformes des chaînes. Mais le modèle des Netflix et Amazon étant fondés sur la création d’exclusivités, on a du mal à comprendre vers quelles obligations les sénateurs souhaitent s’orienter.
D’autant que, malgré l’inquiétude de Mme Morin-Dessailly autour des turpitudes du festival de Cannes, la question centrale portée parOkja n’est pas abordée par les propositions. Le Sénat ne se mouille en effet pas avec les exploitants et préfère s’inquiéter des difficultés financières du Groupe Canal+ et de l’application effective des DRM sur toutes les plateformes. Chacun son époque.
Documents du Sénat : Compte rendu (PDF) — Synthèse finale (PDF).
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