Les sites internet qui ne sont pas soumis à la régulation du CSA peuvent diffuser librement des vidéos avec des scènes de sexe très explicites et graphiques, pourvu que le scénario et la recherche créatrice soient de qualité. C'est en tout cas la vision étonnamment libertaire induite par le ministère de la culture, mais démentie par la justice.

Qu'est-ce qu'un film pornographique et donc à partir de quels critères faut-il décider de l'interdire aux moins de 18 ans ? La question se pose pour l'exploitation au cinéma, mais aussi à la télévision, sur les services de vidéo à la demande (VOD), et même sur les sites internet qui diffusent des contenus pornographiques et doivent, en principe, en interdire l'accès aux mineurs. 

En matière de VOD, le CSA a adopté fin 2011 une délibération qui met fin aux horaires de location des films pornographiques à la demande, mais avec une exigence renforcée en matière de contrôle de la majorité. Les vidéos concernées ne doivent pouvoir être vues qu'après la saisie d'un code de 4 chiffres créé depuis un espace d'abonné avec un moyen de paiement vérifié (une carte bancaire).

Pour les services encore nombreux qui ne sont pas soumis au CSA, l'article 227-24 du code pénal interdit en tout état de cause de "diffuser par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support un message à caractère violent ou pornographique (…) lorsque ce message est susceptible d'être vu ou perçu par un mineur". Ils ne sont donc pas soumis à la signalétique du CSA, mais doivent s'interdire de diffuser un film ou une vidéo qui serait interdit aux mineurs, sans que la majorité du spectateur soit vérifiée.

Mais encore faut-il pouvoir définir ce qu'est un film pornographique. Le ministère de la Culture en a donné une définition des plus étranges pour défendre son refus de classer comme tel le film "Nymphomaniacs, Volume 2", dans lesquelles le spectateur peut voir des scènes très explicites, avec gros plans. Selon l'ordonnance de référé (.pdf) du tribunal administratif de Paris, rendue le 5 février 2014, la ministre Aurélie Filipppetti a en effet prétendu que "un film qui montre des scènes de sexe non simulées ou de violence ne peut être sur cette seule constatation classé en X dès lors que l’auteur, par la qualité du scénario, réalise une œuvre esthétique". Elle ajoutait que "le film, s’il comporte des images crues, procède d’une recherche créatrice et ne présente donc pas le caractère d’un film pornographique".

Il suffirait donc au producteur d'avoir un scénario "de qualité" et de procéder à une "recherche créatrice" pour ne pas son film classé X. Une interprétation qui n'a évidemment pas convaincu le tribunal, qui a ordonné la suspension du visa d'exploitation, et qui a fait sursauter Marc Le Roy, docteur en droit spécialiste du droit du cinéma :

Si vous souhaitez approfondir le sujet de l'équilibre entre censure et liberté d'expression en matière de films X ou violents, la lecture de l'article écrit par Marc Le Roy pour INA Global est d'une très grande richesse.

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