Ce n'est pas une surprise puisque le Gouvernement lui-même avait dit le souhaiter, lors des débats parlementaires. Mais c'est à la demande des députés que le Conseil constitutionnel a été appelé jeudi à examiner le projet de loi sur la géolocalisation, qui autorise la police judiciaire à mettre en place "tout moyen technique destiné à la localisation en temps réel" des suspects de crimes et délits. Le Conseil rendra son avis dans son plusieurs semaines.
La saisine des sages du Palais Royal aura le grand bénéfice d'aboutir à un arbitrage clair entre la vision retenue dans le projet de loi adopté par le Parlement, et celle qu'avait affirmée la cour de cassation le 22 octobre dernier, lorsque la cour avait décidé d'annuler les géolocalisations de smartphones opérées par les policiers dans le cadre d'enquêtes pénales.
Se référant à l'article 8 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme (CEDH), qui fait partie du bloc de constitutionnalité que le Conseil devra prendre en compte, la cour de cassation avait prévenu que l'Etat ne pouvait "organiser une ingérence dans la vie privée des personnes qu’à la condition d’en placer la surveillance et l’exécution sous le contrôle de l’autorité judiciaire, ce que n’est pas le Parquet, qui n’est pas indépendant". Or le texte adopté par les députés et les sénateurs donne au Parquet la possibilité d'ordonner des géolocalisations sans attendre l'avis d'un juge indépendant, qui peut intervenir jusqu'à 15 jours après la mise en place du mouchard.
Lors des débats, la ministre de la Justice Christiane Taubira avait ignoré l'avis de la CNIL, qui préconisait de trancher la poire en deux, à 8 jours de délai maximum.
S'il est saisi sur cet aspect, l'avis du Conseil constitutionnel pourra également être précieux pour savoir s'il est conforme aux principes de défense de la vie privée d'autoriser par la loi "tout moyen technique" de géolocalisation, sans être plus précis. Telle que rédigée, la loi autorise non seulement l'installation physique d'émetteurs sur les véhicules ou les vêtements des suspects, mais aussi la collecte de données à distance (à partir d'un téléphone, d'une montre connectée, d'une paire de lunettes connectées…), que ce soit par la collaboration des opérateurs ou par l'exploitation de failles de sécurité.
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