Ce mercredi 12 mars ne marque pas seulement le vingt-cinquième anniversaire de l'acte de naissance du world wide web, dont les fondations ont été jetées par Tim Berners-Lee dans un document publié dans le cadre du CERN. Il s'agit aussi de la journée mondiale contre la cybercensure, qui a été instaurée en 2008 à l'initiative de Reporters Sans Frontières (RSF).
19 pays ennemis d'Internet
Dans sa nouvelle édition, l'organisme français de défense de la liberté de la presse a mis à jour sa liste des pays perçus comme des ennemis d'Internet. Dix-neuf nations sont épinglées pour 2014, dirigées essentiellement par des gouvernements autoritaires ou autocrates. La majorité d'entre elles avait déjà été dénoncée par RSF, notamment en 2011 et 2012.
Ces pays sont l'Iran, la Russie, le Pakistan, le Vietnam, la Chine, la Corée du Nord, l'Arabie saoudite, la Syrie, les Émirats Arabes Unis, Bahreïn, le Turkménistan, l'Ouzbékistan, la Biélorussie, Cuba, le Soudan et l'Éthiopie. Plus problématique, trois États ayant opté pour une forme de gouvernement démocratique sont également pointés du doigt : il s'agit des États-Unis, de l'Inde et du Royaume-Uni.
Des démocraties citées, la France pas épargnée
Pour ces trois pays, le même constat est fait par RSF : la surveillance massive et automatisée est en marche. Les USA sont ainsi critiqués au travers de la NSA, qui est devenu le "symbole des dérives des services de renseignement", tandis que nos voisins d'outre-Manche sont considérés comme les "champions du monde de la surveillance". En Inde, c'est carrément "Big Brother qui est en marche".
Si ces trois États ainsi que les seize autres cités plus haut en prennent pour leur grade, la France n'est pas épargnée pour autant. Certes, l'Hexagone n'est pas considéré comme un ennemi d'Internet mais l'ONG française note que la nouvelle majorité présidentielle n'est pour l'instant pas franchement parvenue à se démarquer de la précédente, qui ne s'était pourtant guère distinguée en la matière.
L'article 20 de la loi de programmation militaire
Ainsi, RSF critique tout particulièrement l'article 20 de programmation militaire, que Jean-Jacques Urvoas défend contre vents et marées, et qui autorise la surveillance extrajudiciaire et en temps réel des communications téléphoniques et sur Internet. L'ONG constate que le texte a été adopté "à la hussarde malgré les protestations de nombreuses organisations de défense de droits de l'Homme".
"Les motifs invoqués sont larges et évasifs et vont de la « recherche de renseignements intéressant la sécurité nationale » à « la sauvegarde des éléments essentiel du potentiel économique de la France » en passant par « la prévention du terrorisme, de la criminalité et de la délinquance organisées et de la reconstitution ou du maintien de groupements dissous »", souligne RSF.
Loi sur l'égalité homme / femme et la lutte contre la prostitution
RSF pointe également les lois sur l’égalité homme-femme et la lutte contre la prostitution, qui "ont contribué à augmenter la responsabilité des intermédiaires techniques dans le filtrage des contenus après notification". S'il n'est plus question de filtrage administratif, la pression demeure contre l'expression du sexisme sur Internet, l'un des combats centraux de la ministre Najat Vallaud-Belkacem.
"L’article 17 du projet de loi sur l'égalité femmes-hommes oblige les fournisseurs d’accès à Internet et les hébergeurs à identifier et à signaler tout contenu incitant ou provoquant à la haine sur une base sexiste, handiphobe ou homophobe", poursuit l'organisme.
Salons sur la sécurité intérieure
Outre les dispositions législatives ayant trait au réseau des réseaux, RSF a également critiqué la tenue en 2013 de deux salons consacrés à la sécurité intérieure, à savoir Milipol et le forum TAC (Technology Against Crime). Avec ISS World, un autre évènement du même acabit, il s'agit-là de "dealers de la surveillance" qui sont eux aussi considérés comme des ennemis d'Internet.
RSF note d'ailleurs que "ces forums mettent en relation des sociétés spécialisées dans l’interception des communications ou le blocage de contenus en ligne avec des officiels et des représentants des gouvernements iranien, chinois, bahreïni, etc. Là encore, il convient de pointer le comportement ambivalent des démocraties occidentales".
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