C’est l’un des engagements d’Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle : interdire l’usage des téléphones portables dans l’enceinte des écoles primaires et des collèges. Et son ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, entend de toute évidence donner corps à cette promesse dès que possible.
« Avec les principaux, les professeurs et les parents nous devons trouver le moyen de protéger nos élèves de la dispersion occasionnée par les écrans et les téléphones », avait-il confié lors d’un entretien accordé à L’Express en septembre 2017. Mais l’ancien recteur d’académie avait toutefois apporté une précision qui a son importance.
Il ne s’agirait pas d’interdire le téléphone portable dans tout l’établissement scolaire, mais juste dans les classes. En clair, les élèves pourraient en disposer dans les couloirs, pendant la cantine ou dans la cour de récréation. Ce n’est qu’au moment de rentrer dans la classe que les élèves auraient l’obligation de le déposer.
« En conseil des ministres, nous déposons nos portables dans des casiers avant de nous réunir. Il me semble que cela est faisable pour tout groupe humain, y compris une classe », a-t-il expliqué.
Il me semble que cela est faisable pour tout groupe humain, y compris une classe
Reste que Jean-Michel Blanquer pointe à juste titre que « l’usage des téléphones est déjà interdit en classe », que ce soit par les règlements intérieurs des établissements scolaires ou par la loi. Il ne s’agit donc pas tant d’interdire les smartphones en classe que de mettre effectivement en œuvre une interdiction qui existe déjà. Une volonté qui a été réaffirmée en décembre 2017 avec l’annonce de l’interdiction appliquée dès la rentrée 2018. D’après le ministre, les modalités sont encore au stade de la réflexion.
Dans le code de l’éducation, l’article L511-5 expose en effet que «dans les écoles maternelles, les écoles élémentaires et les collèges, l’utilisation durant toute activité d’enseignement et dans les lieux prévus par le règlement intérieur, par un élève, d’un téléphone mobile est interdite ». Oui, mais comment ?
Brouilleurs ? Détecteurs ?
Les marges de manœuvre paraissent réduites : il n’est par exemple pas possible de faire appel à des technologies spéciales pour neutraliser les smartphones pendant les heures de cours, afin de s’assurer de l’attention des élèves. Les dispositifs brouillant les ondes sont par exemple interdits.
L’article L33-3-1 du code des postes et des communications électroniques explique que seules quelques activités très précises ont le droit de s’en servir, « pour les besoins de l’ordre public, de la défense et de la sécurité nationale, ou du service public de la justice ». Le brouillage n’est donc pas possible, sans parler des effets indésirables qui pourraient apparaître aux alentours ou dans de l’établissement scolaire, avec le brouillage d’appareils extérieurs à l’objectif recherché.
Quant aux détecteurs de signaux, qui sont déployés au niveau des salles d’examen pour repérer l’usage de smartphones pendant les épreuves, ils paraissent être des dispositifs très situationnels : que l’on repère un élève communiquant avec l’extérieur pendant le bac peut se comprendre, au regard des enjeux du moment (même si normalement, les mobiles sont censés être éteints et rangés).
Ils paraissent nettement moins pertinents pour une journée normale de cours. Surtout que la détection pourrait ne jamais s’arrêter. Comment le détecteur pourrait-il en effet faire la distinction entre les smartphones d’élèves ayant actuellement cours avec ceux d’élèves dans les couloirs ou dans la cour de récréation parce que le prof n’est pas là ou parce qu’ils n’ont pas cours à ce moment-là ?
Et même : comment ferait-il la distinction avec les smartphones des profs ?
Au regard de ces éléments, les espaces d’action de Jean-Michel Blanquer, qui a expliqué à nos confrères vouloir « faire respecter les règles et le droit », paraissent dès lors très réduits. L’opportunité d’installer des casiers pour les élèves paraît même être la plus indiquée — malgré le coût initial et celui de la maintenance. Cela nous laisse penser que toute cette affaire risque de finir en statu quo, en s’en remettant aux professeurs pour qu’ils agissent et sanctionnent au cas par cas dès qu’ils voient un élève en train d’envoyer un SMS ou de surfer sur le net.
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