En seulement une année, entre 2015 et 2016, les fouilles d’appareils électroniques tels que les ordinateurs portables et les smartphones aux frontières des États-Unis ont quintuplé, passant de 4 764 à 23 877. Face à l’essor continu de cette pratique en 2017 — 15 000 fouilles ont déjà été réalisées à ce stade –, deux organisations de défense des droits civiques ont décidé de riposter.
L’Electronic Frontier Foundation (EFF), qui veille au respect des droits numériques, et l’Union américaine pour les libertés civiles (ACLU) ont engagé des poursuites, ce mercredi 13 septembre, contre le gouvernement américain pour cette pratique jugée « inconstitutionnelle » et portant atteinte au respect de la vie priée.
Dans leur plainte déposée devant la cour fédérale du Massachusetts contre les responsables du département de la sécurité intérieure et de deux agences liées au contrôle des douanes, les plaignants espèrent faire reconnaître l’illégalité de ces fouilles réalisées sans mandat de perquisition, au regard des articles 1 et 4 de la Constitution.
Des fouilles sans mandat de perquisition
Les deux organisations l’affirment : « Les douanes ne doivent pas servir de [prétexte] permettant aux forces de l’ordre de s’immiscer dans nos vies personnelle et professionnelle. […] Le gouvernement dit qu’il peut fouiller nos appareils sans aucune raison, sans mandat de perquisition ni le moindre soupçon sur la violation des lois relatives à l’immigration ou aux douanes. »
L’EFF et l’ACLU entendent ainsi défendre 10 citoyens américains aux profils variés qui ont tous pour point commun d’avoir subi de telles fouilles : des étudiants, des journalistes, mais aussi un militaire ou encore un chauffeur de limousine. Tous ont vu « leurs droits bafoués quand des agents aux frontières ont fouillé leurs smartphones ou autres appareils électroniques alors qu’ils revenaient d’un voyage à l’étranger […] sans que le moindre d’entre eux soit accusé d’un quelconque méfait ou se soit vu expliquer [cette fouille]. »
D’autant que certaines de ces victimes n’ont toujours pas récupéré le smartphone qui leur a été confisqué, même 7 mois après la fouille, à l’instar de Suhaib Allababidi. D’autres, comme Matt Wright, n’ont pu remettre la main dessus qu’au bout de plusieurs semaines, après que les agents de la douane l’ont mis de côté pour une recherche plus poussée.
Une fouille de nos téléphones en dit bien plus long sur nous qu’une fouille de nos maison
L’ACLU et l’EFF ne manquent pas de pointer le danger que représente une telle intrusion dans ces appareils : « Nos téléphones sont devenus des plans détaillés de toute notre vie. Ils contiennent énormément d’informations sensibles et personnelles, dont l’essentiel de nos communications écrites, notre liste de contacts, des données géolocalisées, et des photos et vidéos qui dévoilent les aspects les plus intimes de nos relations. » Et les deux organisations de conclure : « Pour la majorité d’entre nous, une fouille de nos téléphones en dit bien plus long sur nous qu’une fouille minutieuse de nos maisons. »
Face aux pratiques en vigueur aux douanes, l’EFF avait déjà publié un guide pour indiquer au voyageurs les meilleures pratiques à adopter pour assurer la sécurité de leurs données personnelles.
La procédure entamée par l’EFF et les plaignants trouve un certain écho auprès de plusieurs internautes qui témoignent de leur propre expérience sur le site de l’ACLU. L’un d’entre eux affirme ainsi : « Ça m’est arrivé l’an dernier pendant mes vacances. C’était vraiment scandaleux. On m’a traité comme un criminel et menacé d’arrestation si je ne leur déverrouillais pas le téléphone. Leurs armes étaient pointées sur moi tout du long. […] Si vous avez besoin d’autres plaignants dans cette affaire, je serais ravi de me porter volontaire. »
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