Pour un pays qui proclame que la « défense des droits de l’Homme fait partie de son identité », c’est une critique fâcheuse. Alors que l’Assemblée nationale a commencé à examiner le projet de loi sur la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, deux experts des Nations unies ont jugé bon d’écrire au gouvernement pour lui rappeler qu’il serait quand même appréciable que la France « honore ses engagements et obligations internationaux en matière de droits de l’homme ».
À l’origine du courrier peu flatteur pour l’Hexagone se trouvent l’Irlandaise Fionnuala Ní Aoláin, rapporteuse spéciale sur la protection des droits de l’homme dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, et le Français Michel Forst, rapporteur spécial sur les défenseurs des droits de l’homme, qui s’est fait remarquer pour ses fortes réserves sur la loi relative au renseignement ainsi que sur la législation sur l’état d’urgence et celle sur la surveillance des télécommunications en France.
Une menace grave pour l’intégrité de la protection des droits en France
L’entrée des dispositions de l’état d’urgence dans le droit commun, ce que permettra le texte s’il est adopté et promulgué tel quel, « menace gravement l’intégrité de la protection des droits en France » met ainsi en garde la rapporteuse. Pour son confrère, le projet comprend « des restrictions aux libertés civiles ». Des critiques qui rejoignent celles déjà émises par la Cnil, des organisations civiles, des juristes, le défenseur des droits Jacques Toubon et le commissaire européen aux droits de l’homme.
« Plusieurs dispositions du projet de loi qui menacent l’exercice des droits à la liberté et à la sécurité personnelle, le droit d’accès à la justice, et les libertés de circulation, d’assemblée pacifique et d’association, ainsi que d’expression, de religion ou de conviction », est-il en particulier dénoncé. Le « libellé vague » de certaines mesures a aussi été pointée du doigt, « en particulier celles se référant aux notions de terrorisme et de menaces pour la sécurité nationale », qui pourrait accentuer l’arbitraire de l’État.
« En outre, donner aux autorités non judiciaires, en particulier les préfets et la police, des pouvoirs discrétionnaires étendus, et élargir l’application des pratiques de contrôle, peut avoir des répercussions néfastes sur les droits de chacun et en particulier, discriminatoires pour les personnes de confession musulmane » , ajoutent-ils. Or, la France, du fait de son histoire et de son statut dans le monde, est observée dans le monde, notent-ils. Il faut donc que Paris prenne garde au message qu’elle envoie.
Les experts font ainsi remarquer que « beaucoup de pays regardent avec attention ce qui se passe en France, pour s’inspirer de son exemple. En démontrant comment la gestion des menaces terroristes peut être menée dans le cadre de l’État de droit, sans mettre en péril son engagement envers la protection des droits de l’homme, la France a un rôle de premier plan à jouer, tant à l’échelle nationale, régionale qu’internationale ». Et un cap à donner sur ce qui est censé faire partie de son identité.
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