La Cour de cassation a transmis au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité au sujet du nouveau délit de consultation habituelle de sites terroristes. Une première version de la sanction avait été censurée.

Le Conseil constitutionnel va-t-il dynamiter encore une fois le tristement célèbre délit de consultation habituelle de sites faisant l’apologie des actes de terrorisme ou encourageant à en commettre ? En tout cas, l’institution dont le rôle est de veiller à ce que les textes votés par le législateur soient bien conformes à la Constitution va de nouveau avoir à se pencher sur cette problématique.

En effet, la Cour de cassation a décidé dans un arrêt prononcé mercredi 4 octobre de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité pour que les membres du Conseil vérifient si la nouvelle rédaction du délit est conforme avec la norme juridique suprême. Cette version a ajouté les critères de motif légitime et de manifestation de l’adhésion à l’idéologie exprimée sur ce service.

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Rappel des faits : en début d’année, le Conseil constitutionnel a censuré la disposition instituant ce délit, à savoir l’article 421-2-5-2 du code pénal, qui avait été introduit par la loi du 3 juin 2016. Son inconstitutionnalité avait été pointée du doigt par les Sages de la rue de Montpensier, avec trois arguments : inutile, inadapté et disproportionné avec la Déclaration des droits de l’homme de 1789.

Le législateur n’a toutefois pas voulu abandonner l’idée de pénaliser la consultation habituelle de sites. Lors de la commission mixte paritaire mise en place pour lisser les désaccords entre le Sénat et l’Assemblée nationale sur le projet de loi relatif à la sécurité publique, le délit a été réintroduit le sénateur Philippe Bas et le député Éric Ciotti (qui a même suggéré de réécrire la Constitution).

Un article partiellement réécrit pour tenir compte de la censure du Conseil constitutionnel

L’article a donc été en partie remanié mais les finalités sont restées les mêmes : punir quiconque consulte habituellement ce type de site avec une peine de prison de deux ans et une amende de 30 000 euros. Toute la question est de savoir si les réécritures faites par le législateur permettront au délit de se maintenir dans la loi ou si une nouvelle censure va avoir lieu.

À cette interrogation, la Cour de cassation ne paraît guère très convaincue par l’utilité et la proportionnalité de cette pénalisation. Dans son arrêt, elle écrit en effet « qu’il apparaît justifié que le Conseil constitutionnel examine si la nouvelle rédaction de l’article 421-2-5-2 du code pénal porte une atteinte nécessaire, adaptée et proportionnée au principe de liberté de communication ».

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Pour ou contre ?

La juridiction fait mention « des dispositions déjà existantes dans la législation pénale et des pouvoirs reconnus à l’autorité judiciaire et aux autorités administratives afin de prévenir la commission d’actes de terrorisme ». En creux, on comprend que l’arsenal législatif est déjà bien étoffé et que l’ajout systématique de nouvelles dispositions n’est pas toujours pertinent vu les armes juridiques déjà en place.

Surtout, « une incertitude est susceptible de peser sur la notion de motif légitime rendant la consultation licite dès lors qu’elle n’est définie que par des exemples ; qu’il en est de même de la référence nécessaire à la manifestation de l’adhésion à l’idéologie exprimée sur le service concerné par l’auteur de la consultation », ajoute la Cour de cassation.

Ces débats juridiques sont nés à la suite d’une action en justice visant un Angevin. Ce délit a été utilisé en 2016 pour le condamner à deux ans de prison. Il avait été établi qu’il avait notamment fréquenté un groupe de diffusion de Daech sur Telegram, une messagerie chiffrée. L’affaire était remontée jusqu’à la Cour de cassation puis le Conseil constitutionnel, avec le résultat que l’on sait.

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