Lorsque les activités de surveillance de la NSA ont été révélées au grand jour en 2013, une étude de l'ITIF (Information Technology & Innovation Foundation) a cherché à en évaluer les effets sur les activités des sociétés américaines vendant des solutions de stockage à distance. À l'époque, l'ITIF avait estimé que le secteur pourrait perdre entre 22 et 35 milliards de dollars sur trois ans à cause du scandale.
Dans les faits, les répercussions économiques suite aux premiers articles détaillant les programmes d'espionnage de masse ne se limitent absolument pas à l'univers du cloud. La preuve avec la décision du gouvernement allemand de ne pas renouveler un contrat avec Verizon, un important opérateur américain dont les liens avec la NSA ont été dévoilés dès le début de l'affaire.
"Il y a des éléments indiquant que Verizon est légalement tenu de fournir certaines choses à la NSA, et c'est l'une des raisons pour lesquelles la coopération avec Verizon ne va pas continuer", a expliqué Tobias Plate, porte-parole du ministère de l'intérieur, à l'Associated Press. Il n'est toutefois pas question de rompre le contrat en cours, celui-ci expirant l'année prochaine.
La marque de la Stasi sur l'Allemagne
En Allemagne, les révélations sur les programmes de surveillance ont eu un impact beaucoup plus fort qu'en France. Le pays a en effet connu les ravages de la Stasi sur son sol et est, de fait, beaucoup plus sensible aux questions relatives à la vie privée. Ainsi, découvrir que la NSA a intercepté les communications de la chancelière Angela Merkel pendant des années à suscité un véritable tollé.
C'est parce que l'Allemagne a connu le ministère de la Sécurité d'État que sa législation sur la confidentialité des données personnelles et la vie privée des Allemands est plus protectrice que les lois d'autres pays.
Dans les semaines qui ont suivi la découverte du programme PRISM et de tous les autres, la chancelière allemande a plaidé en faveur d'un moteur de recherche européen équivalent à Google afin que les informations privées des internautes et leurs habitudes de navigation ne tombent pas toujours entre les mains des firmes américaines et, par ricochet, dans celle de la NSA.
En la matière, des initiatives sont déjà en place comme Quaero, qui a abouti au lancement d'Exalead.
Lors d'une rencontre avec François Hollande survenue en début d'année, il a aussi été question d'un "Internet européen", avec en particulier la volonté affichée de durcir la régulation du stockage de données à distance (cloud), pour obliger les prestataires à héberger et traiter les données localement, sur le Vieux Continent plutôt qu'aux États-Unis, en Asie ou ailleurs.
Une décision aux effets diplomatiques limités
Cela étant, l'Allemagne n'est pas une oie blanche. Si elle se montre plus préoccupée sur ces thématiques, la nation – du moins les autorités – a aussi ses propres services de renseignement. Et ces derniers espionnent aussi les communications électroniques (notamment françaises) mais aussi allemandes, vu la nature du mouchard de la police qui a été analysé par le Chaos Computer Club.
Enfin, la mesure prise à l'encontre de Verizon, si elle n'est pas anodine, reste suffisamment maîtrisée pour ne pas déclencher le courroux de l'allié américain. Il n'est par exemple pas question d'accorder l'asile politique à Snowden (l'Allemagne avait reçu une demande) ni d'autoriser son audition par les parlementaires allemands. La chancellerie s'y oppose.
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