Les sénateurs ont adopté jeudi l'article 9 du projet de loi de lutte contre le terrorisme, portant sur le blocage sans contrôle judiciaire des sites de propagande terroriste. Très proche de celui élaboré par l'Assemblée Nationale, le dispositif retenu prévoit le mécanisme suivant, pour "les nécessités de la lutte contre la provocation à des actes terroristes ou l'apologie de tels actes" et pour la lutte contre "la diffusion des images ou des représentations de mineurs" pédopornographiques :
- L'autorité administrative (en pratique l'OCLCTIC, c'est-à-dire le département de la police nationale chargée de la lutte contre la cybercriminalité) demande à l'éditeur ou à l'hébergeur du site internet de retirer les contenus en cause, et en informe les FAI ;
- Après un délai de 48 heures, faute de réaction de l'éditeur et de l'hébergeur (ou sans attendre ce délai si l'hébergeur et l'éditeur ne sont pas identifiés), l'autorité administrative communique aux FAI la liste des URL dont elle demande la suspension.
- Les FAI doivent alors "procéder sans délai aux opérations empêchant l'accès à ces adresses", sans que l'illégalité effective des sites listés ne soit vérifiée par un juge. Le blocage devra se faire par DNS. ;
- Pour seule maigre garantie, le texte prévoit que la liste des sites à bloquer est transmise à une "personnalité qualifiée désignée en son sein par la CNIL" (qui n'a pourtant aucune compétence dans le domaine), c'est-à-dire à une seule personne, et non un juge indépendant, qui "s'assure de la régularité des demandes de retrait et des conditions d'établissement, de mise à jour, de communication et d'utilisation de la liste".
- Cette personnalité qualifiée peut "recommander" à la police de mettre fin à un blocage qu'elle estime abusif, et si sa recommandation n'est pas suivie d'effet (aucun délai n'est précisé), elle peut saisir le juge administratif.
Le texte prévoit enfin que cette personnalité qualifiée remet un rapport d'activité annuel, rendu public, qui détaille "le nombre de demandes de retrait, le nombre de contenus qui ont été retirés, les motifs de retrait et le nombre de recommandations faites à l'autorité administrative". Mais c'est là la seule transparence à laquelle auront droit les citoyens. La liste des sites bloqués ne sera pas publiée, et il sera très difficile pour les sites bloqués d'exercer un recours, puisqu'il n'y aura pas de décision publiée contre laquelle s'opposer.
En outre, le Gouvernement a fait adopter un amendement qui ajoute que "l’autorité administrative peut également notifier les adresses électroniques dont les contenus contreviennent aux articles 421-2-5 et 227-23 du code pénal aux moteurs de recherche ou aux annuaires, lesquels prennent toute mesure utile destinée à faire cesser le référencement du service de communication au public en ligne".
Enfin, le texte modifie l'article 6 de la loi pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN), pour imposer aux FAI et hébergeurs de "concourir à la lutte contre la diffusion" des contenus incitant au terrorisme ou faisant son apologie, ce qui manifeste par l'obligation de :
- mettre en place un dispositif facilement accessible et visible permettant à toute personne de porter à leur connaissance ce type de données ;
- informer promptement les autorités publiques compétentes de toutes activités [d'incitation ou apologie du terrorisme] qui leur seraient signalées et qu'exerceraient les destinataires de leurs services ;
- rendre publics les moyens qu'elles consacrent à la lutte contre ces activités illicites.
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