À choisir, il est sans doute préférable qu'un film soit piraté par les internautes plutôt qu'il soit ignoré par le public. Au moins dans le premier cas, il aura été vu. Voilà la position que le cinéaste Michel Gondry a tenu au cours d'une interview avec le journal 20 Minutes, tranchant avec la ligne généralement observée au sein de l'industrie cinématographique, qui rejette en bloc le téléchargement illicite, qu'importe les raisons.
Interrogé sur les effets que peut avoir le piratage sur ses activités de réalisateur, Michel Gondry, dont la réputation s'est forgée avec le célèbre long-métrage "Eternal Sunshine of the Spotless Mind", s'est montré très clair : "je pense qu'il y a des crimes plus graves que de pirater ! Je préfère que mes films, comme Conversations avec Noam Chomsky, soient piratés plutôt que pas vus !".
Cela étant, il faut lire ce qu'il dit en creux.
Il ne dit pas que le piratage n'est pas un délit. Mais que sur l'échelle des infractions, il y a des choses plus critiques (quoique le code pénal comporte quelques surprises dans la hiérarchie des crimes). En somme, sa position est plus proche d'un Mathieu Kassovitz (critique envers Hadopi et soutien affiché du Parti Pirate) que d'un Steven Spielberg (le piratage des films est une "artère tranchée").
De façon générale, les réalisateurs ont des positions très diverses sur ce sujet.
Par exemple, James Cameron préfère miser sur l'innovation plutôt que sur la répression pour contrer le piratage. Pour, Francis Ford Coppola, il faut aller en direction du cinéma vivant. Harald Zwart, pour sa part, n'a pas regretté le piratage de son travail. Certains encouragent même le piratage à des fins politiques, comme Michael Moore.
Et l'on pourrait aussi mentionner les déclarations d'un des réalisateurs de Game of Thrones ou celles du directeur de la programmation de HBO, la tribune anti-Hadopi de treize réalisateurs français ou les propos de Luc Besson regrettant que la lutte contre le piratage, lorsque la loi Hadopi était élaborée, ne prenne pas suffisamment en compte les sites de streaming (mais les temps changent).
Et l'offre légale, qu'en pense Michel Gondry ? Le réalisateur explique qu'il n'opte évidemment que pour cette solution. Hélas, celle-ci est souvent décevante. "Pour ma part, je n'achète que légalement et je me fais souvent avoir. Je viens de me faire débiter ma carte de crédit trois fois par le site d'Arte sans pouvoir récupérer le programme que je voulais voir".
Des propos qui rappellent furieusement le fameux test de la blogueuse Klaire, qui avait mis en lumière l'année dernière les faiblesses des plateformes légales.
( photo : CC BY-NC-SA EgnaroogangE )
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