Dans le cadre de la lutte contre le téléchargement illicite, l'effort a d'abord été porté sur les échanges sur les réseaux peer-to-peer (P2P) avec le vote de la loi Hadopi. Mais avec le développement du téléchargement direct et des plateformes de streaming, qui attirent un nombre croissant d'internautes voulant échapper à la riposte graduée, le gouvernement est en train de changer son fusil d'épaule.
Contre ces nouveaux modes d'accès aux œuvres, les autorités sont convaincues de la nécessité d'impliquer les intermédiaires techniques et financiers afin de couper les vivres aux sites qui prospèrent sur le téléchargement illégal. Un rapport en ce sens a été préparé par Mireille Imbert-Quaretta, avec le souci de se passer au maximum de l'institution judiciaire pour gagner du temps et éviter les déconvenues.
LES RÉGIES PUBLICITAIRES
Concernant les intermédiaires financiers, l'exécutif a confié à un fonctionnaire le soin de rédiger une charte en concertation avec les professionnels de la publicité, pour obliger ces derniers à ne pas faire des affaires avec les sites accusés de profiter du piratage. Jusqu'à présent, les régies publicitaires n'y étaient pas opposées, mais un syndicat avait souligné la nécessité de mettre la justice dans la boucle.
La situation a visiblement changé. Le quotidien La Tribune, qui a interrogé le directeur général d'IAB France ce mois-ci, n'évoque pas la participation de l'institution judiciaire. L'on ne parle que d'un retrait pur et simple des publicités sur les sites incriminés, ce qui laisse à penser que l'action contre les sites spécialisés dans le streaming et le téléchargement illicite se fera, pour partie, hors du cadre judiciaire.
QUELLE PLACE POUR LA JUSTICE ?
Pour la Quadrature du Net, qui suit de très près ces questions, c'est un très gros problème "Ces dispositions rappellent très fortement les principes de fonctionnement de la loi SOPA aux États-Unis ou de l'accord ACTA". "Il s'agit à nouveau d'impliquer des intermédiaires dans la mise en œuvre du droit d'auteur, cette fois par une coopération volontaire et non plus par la contrainte de la loi et du juge".
"En contournant à la fois le Parlement et la Justice, cette nouvelle stratégie renforce encore l'opacité du système et fragilise les garanties des droits fondamentaux", s'inquiète l'association, qui relève que la "catégorie de « sites massivement contrefaisants » est particulièrement floue et ouvre la voie à un arbitraire important". Arbitraire qui pourra ensuite être étendu à d'autres intermédiaires.
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