Le président de la FCC Tom Wheeler a finalement cédé aux géants du web et au président Barack Obama, qui ont demandé une protection sans concessions de la neutralité du net. De nouvelles règles seront proposées, qui feront de l'accès à internet une "utilité publique" soumise à des obligations d'ouverture et de non-discrimination.

Le combat des défenseurs de la neutralité du net et le poids mis par le président Barack Obama en personne auront finalement fait peser la balance du bon côté. Mercredi, le président de la Commission Fédérale des Communications (FCC), l'organe chargé de réguler les télécoms aux Etats-Unis, a fait savoir que l'autorité proposerait de nouvelles règles d'encadrement du secteur, qui feraient de l'accès à Internet un véritable service d'utilité publique plutôt qu'un service commercial soumis à de simples obligations d'être "raisonnable" dans les pratiques contractuelles.

Concrètement, cette classification qui rejoint celle de la fourniture d'eau, du téléphone ou de l'électricité repousse le risque d'un internet à deux vitesses qu'avait soulevé la précédente proposition de la FCC, applaudie par les opérateurs mais très durement critiquée, jusque dans une émission de télévision grand public. Les nouvelles règles feront interdiction aux fournisseurs d'accès à internet de faire payer les éditeurs de sites ou de services en ligne pour bénéficier d'une bande passante prioritaire, ou de bloquer ou freiner les services de ceux qui ne payent pas.

"Cette semaine, je ferai circuler auprès des membres de la Commission Fédérale des Communications (FCC) de nouvelles règles proposées qui préserveront l'internet en tant que plateforme ouverte pour l'innovation et la liberté d'expression", écrit le patron de la FCC Tom Wheeler dans une tribune publiée sur Wired. Il explique qu'il a finalement renoncé à la simple obligation d'un service "commercialement raisonnable" en raison du risque que la "raison" soit jugée à l'aune des seuls intérêts commerciaux, et non celle du plus grand nombre.

LA NEUTRALITÉ AUSSI SUR LE MOBILE

En classant l'accès à internet comme service d'utilité publique, les FAI auront notamment l'obligation de respecter des principes d'ouverture, qui leur feront interdiction de discriminer entre les paquets échangés.

C'est aussi le sens d'un texte ferme du Parlement européen que plusieurs états membres, dont la France, tentent de repousser au profit des opérateurs qui souhaitent se dégager des marges des manoeuvre pour investir dans la fibre et la future 5G, et augmenter leur chiffre d'affaires. Le débat continue dans les instances européennes. En France, le nouveau patron de l'Arcep Sébastien Soriano a joué à l'équilibriste le mois dernier, en élaborant une sorte de concept de "fermeté souple de la neutralité du net", ménageant la chèvre et le chou.

"Je soumets à mes collèges les protections les plus fortes pour l'ouverture d'internet jamais proposées par la FCC", promet Tom Wheeler dans son texte. "Ces règles exécutoires, lumineuses, interdiront les priorités payantes, et le blocage ou bridage des contenus et services légaux. (…) Ma proposition assure les droits des internautes d'aller où ils veulent, quand ils veulent, et les droits des innovateurs de présenter de nouveaux produits sans demander la permission à quiconque".

Mieux, le patron de la FCC souhaite également que ces règles soient étendues à l'accès à internet mobile, auquel il est pourtant beaucoup plus difficile d'imposer le principe de la neutralité du net, en raison de la rareté des ondes à gérer.

"L'internet doit être rapide, équitable et ouvert. C'est le message que j'ai entendu des consommateurs et des innovateurs à travers cette nation. C'est le principe qui a permis à internet de devenir une plateforme sans précédent pour l'innovation et l'expression humaine. (…) La proposition que je présente à la commission assurera que l'Internet reste ouvert, maintenant et à l'avenir, pour tous les Américains".

Mais même si elle est adoptée par la FCC, ce qui ne fait aucun doute, la proposition pourra toujours être contestée devant les tribunaux par les FAI américains, qui n'y manqueront pas. La bataille est donc encore loin d'être remportée de l'autre côté de l'Atlantique.

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