L'ONG Reporters Sans Frontières (RSF) passe à l'attaque. Après la Quadrature du Net et la fédération FDN, c'est au tour de l'organisme de défense de la liberté de la presse de s'attaquer au décret d'application de la loi de programmation militaire (LPM), qui autorise l'administration à collecter des données personnelles sur les internautes sans le moindre contrôle du juge judiciaire.
Déposé devant le Conseil d'État, le recours de Reporters Sans Frontières vise à obtenir l'annulation du décret d'application, qui organise la mise en œuvre de la LPM et, plus spécifiquement, son article 20. Celui-ci porte sur l'accès administratif aux données de connexion provenant des fournisseurs d'accès à Internet, des opérateurs téléphoniques et des hébergeurs.
En effet, les mesures prises par le gouvernement et validées par le parlement permettent à nombre d'agents du ministère de l'intérieur, de l'unité de coordination de la lutte antiterroriste, de la gendarmerie nationale, de la préfecture et du ministère de la défense et des services fiscaux de Bercy d'obtenir des données personnelles sur des internautes sans contrôle judiciaire.
"Cet article porte gravement atteinte aux droits fondamentaux des citoyens et en particulier à la vie privée, à la liberté d’information et aux secrets des sources", commente RSF, qui relève trois motifs d'inquiétude : "l'absence de contrôle du juge tout au long de la procédure de mise sous surveillance, des objectifs justifiant la surveillance trop larges et un spectre des données recueillies trop étendu".
Soulignant l'incompatibilité du décret d'application avec le droit français mais aussi avec les grands textes européens sur les droits fondamentaux, RSF souligne "une atteinte disproportionnée au secret des sources journalistiques" et l'absence de garanties pourtant requises par l’article 8 de la Charte des droits fondamentaux sur la protection des données à caractère personnel.
RSF rappelle d'ailleurs qu'en avril 2014, la Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE) a jugé que la directive sur la conservation des données était disproportionnée, et qu'elle violait les droits fondamentaux des internautes. Dès lors, le décret d'application étant comme la directive contraire au droit communautaire, RSF espère bien que le Conseil d'État tiendra compte de la jurisprudence de la CJUE et se fera le gardien de la Charte, à défaut de contrôle par le Conseil constitutionnel
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