Le 11 janvier dernier, François Hollande accueillait sur les marches de son palais présidentiel Nizar al-Madani, le ministre d’Etat aux affaires étrangères de l’Arabie Saoudite, venu à Paris pour participer à la "marche républicaine" pour la liberté d'expression. "Je suis Charlie", proclamait l'envoyé spécial du roi. Deux jours plus tôt, le 9 janvier 2015, le blogueur Raif Badawi recevait ses 50 premiers coups de fouets, sur un total de 1000, pour avoir osé critiqué des figures de l'autorité religieuse islamique et du régime saoudien.
Raif Badawi avait été arrêté en 2012 pour avoir fondé le site "Free Saudi Liberals", sur lequel il plaidait pour une libéralisation morale de l'Arabie Saoudite. Il fut condamné en première instance à 7 ans de prison et 600 coups de fouet, avant que la peine soit portée en appel à 1000 coups de fouet et 10 ans de prison. Une peine sans doute plus inhumaine et insoutenable encore que la peine de mort qu'il risquait.
Et qu'il risque toujours.
Dans un billet publié sur la page Facebook du comité de soutien, sa famille annonce qu'elle a reçu des informations selon lesquelles Raif Badawi pourrait de nouveau être jugé devant un tribunal pénal pour le crime d'apostasie, c'est-à-dire pour avoir renoncé à l'islam. Ce chef d'inculpation, très grave en Arabie Saoudite et puni jusqu'à la peine de mort, avait été laissé de côté pour des motifs procéduraux, de répartition des compétences entre tribunaux. Or cet obstacle aurait été levé l'an dernier, et la Cour Suprême aurait décidé de confier l'affaire au magistrat qui a déjà condamné Badawi aux 1000 coups de fouet, et qui avait réclamé la possibilité de le condamner aussi pour apostasie.
La famille assure que ce juge est "partial contre Raif", et qu'il a déjà écrit dans son précédent jugement qu'il avait à la fois des preuves et la conviction que le blogueur était un apostat. Elle demande à la communauté internationale de se mobiliser pour faire pression sur l'Arabie Saoudite pour qu'elle libère Raif Badawi, et le laisse rejoindre les siens au Canada.
Mais les voix des gouvernements ne sont pas montrées d'une grande force. "Nous sommes intervenus et la sentence, qui est inhumaine, a été suspendue. J'espère qu'elle sera totalement rapportée", s'était contenté de dire Laurent Fabius en janvier dernier. Or si les coups de fouet ont été suspendus, c'est uniquement parce que le blogueur risquait de mourir de ses blessures avant d'avoir éprouvé l'intégralité de sa peine.
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