"Quelle réponse donner au blocage administratif décidé par le gouvernement français ? Dois-je me lancer dans une diatribe stérile contre cet Etat qui se veut le défenseur de la liberté d’expression lorsqu’il s’agit d’insulter le christianisme et l’islam mais place les verrous lorsqu’il s’agit de s’opposer à sa politique extérieure ? Le choix a été vite fait : je laisse tomber un combat perdu d’avance tout en contestant fermement les accusations. Mais je n’abandonne pas pour autant mon esprit critique.
Pour que mon message soit le plus clair possible, je vais l’articuler en plusieurs points. D’abord lever le voile sur islamic-news.info, ensuite expliquer en quoi la censure est politique.
Le projet Islamic-News
Le site islamic-news.info a été fondé en mai 2013. Je l’ai créé quelques mois après ma sortie de l’université, mon diplôme de droit international public, diplomatique et consulaire en poche. Si j’utilise la première personne pour écrire, ce n’est pas pour rien. Islamic-News.info repose depuis le tout début sur une seule personne. J’ai écrit moi-même la totalité des articles, du premier jusqu’au dernier. Je suis donc le seul responsable et le seul à qui parler pour évoquer islamic-news.info. Aucun groupe, aucune organisation, aucun mouvement n’est derrière le site. Cette précision a toute son importance car elle démontre le mensonge de Bernard Cazeneuve.
En effet, dans un article de FranceTVinfo, Bernard Cazeneuse revenait sur les censures mises en place et déclarait : « Les cinq premiers sites (dont Islamic-news.info – c’est moi qui cite) sont tous animés par des groupes répertoriés par les services de renseignement et font tous l'apologie du terrorisme. »
Et non monsieur Cazeneuve, aucun groupe n’animait le site islamic-news.info. Aucun groupe ni organisation proche de l’Etat islamique ou d’Al-Qaïda ne l’animait, ni ne le finançait. Le site était dirigé par un seul homme, qui vit en Europe et qui est inscrit légalement sur les registres d’OVH et qui paie avec son propre compte en banque le serveur qu’il loue auprès du numéro 1 français. Aucun cryptage de données n’est utilisé, aucune combine, absolument rien, tout est transparent car il n y a rien à cacher. Je n’avais besoin que de 50 euros par mois pour faire tourner le site et lui donner une allure professionnelle, avec un certain succès d’ailleurs. Des journalistes professionnels m’ont même contacté pour me proposer des articles. Un photojournaliste palestinien de Gaza m’avait offert ses services lors de l’offensive israélienne sur la bande de Gaza, durant l’été 2014. Le nouvel Observateur a cité l’un de mes articles comme source dans la rédaction de l’un de ses billets sur la Syrie. Wikipedia a indexé plusieurs de mes articles comme « références sérieuses ». Bref, pendant près de 2 années, il n y a avait rien à redire. Personne ne trouvait le moindre argument pour démontrer notre illégalité. En 2 ans, j’ai attiré près d’un million de visiteurs uniques. Aucun n’a jamais trouvé élément à contester.
La pertinence des accusations de l’Etat français :
1. Site qui provoque au terrorisme :
Dois-je rire ou pleurer ! Imaginez-vous deux secondes. Un site internet créé en Europe, hébergé en Europe, financé en utilisant mes coordonnées bancaires officielles, avec ma carte d’identité à disposition de l’hébergeur, bref un site totalement transparent qui inciterait ou provoquerait à des actes de terrorisme. Je ne suis pas spécialiste du droit français, mais je sais ce qu’est la provocation au terrorisme, même s’il est difficile de déterminer les limites juridiques du concept. L’incitation ou la provocation au terrorisme n’a aucun sens pour moi, aucun intérêt. Je suis convaincu que mille mots sont plus efficaces que tout acte de violence. C’est ma conviction personnelle. Je n’ai pas étudié 5 années dans l’une des meilleures universitaires européennes pour en sortir « radicalisé » et « assoiffé de sang ». La meilleure manière de prouver cela est de citer un article que j’ai écrit début 2014. J’avais vivement dénoncé les propos d’un combattant en Syrie qui encourageait à commettre des attentats en Europe. J’avais souligné le danger de ce genre de message et ses conséquences néfastes sur la population musulmane en Europe, qui n’a vraiment pas besoin de ça en ces moments. Et cet article je l’ai écrit par conviction personnelle. Bref, appeler les lecteurs à commettre des attentats est impensable, cela dépasse tout bon sens.
2. Le site fait l’apologie du terrorisme :
L’apologie du terrorisme c’est d’abord et avant tout la volonté de montrer « sous un jour favorable » des actes de terrorisme, de les présenter comme « légitimes », voire « nécessaires ». En résumé, c’est défendre les actes de terrorisme commis et se féliciter de leur survenance. Rien, absolument rien, dans ce que j’ai écrit ne fait passer les actes terroristes sous un jour favorable ni ne les légitime. Et puis de quels actes de terrorisme parle-t-on ? Je n’ai pas écrit un mot sur la tuerie de Charlie Hebdo, pas un mot sur les décapitations de l’Etat islamique, pas un mot sur le jordanien brûlé vivant, pas un mot sur les soldats alaouites et chiites massacrés. Bref, j’ai sciemment évité les sujets polémiques qui pourraient être mal interprétés.
En outre, et contrairement à ce qu’avance le ministre de l’intérieur, je n’ai jamais diffusé la moindre vidéo de l’Etat islamique sur mon site. Je ne suis pas idiot. Si je publiai leurs vidéos officielles, je me ferai complice de sa diffusion. Serais-je inconscient à ce point ? Je sais distinguer le légal de l’illégal et je sais où s’arrête la liberté d’expression.
J’aimerai également attirer votre attention sur l’un des articles les plus influents que j’ai écrit. J’avais abordé la question des jeunes européens qui s’engageaient en Syrie pour mener le djihad. J’avais fait un appel public pour qu’ils n’aillent pas se faire tuer pour rien en Syrie dans une guerre qu’ils ne comprennent pas. Mais je ne leur ai pas conseillé d’oublier la Syrie. Au contraire, je leur ai rappelé que 10 millions de réfugiés syriens crèvent de faim et qu’ils feraient mieux d’aider ces réfugiés en récoltant des dons, par exemple, car ce sont eux qui ont le plus besoin de leur aide et non pas les militants de l’Etat islamique. Je crois fermement que les jeunes européens n’ont pas à s’engager militairement en Syrie. Je l’ai écrit, non pas pour faire plaisir aux autorités, mais simplement parce que c’est ma conviction profonde.
Mais alors sur quoi le gouvernement français a-t-il fondé son blocage ? Je pense que la raison est politique. Ma position peut choquer à partir du moment où je vise davantage les opposants de l’Etat islamique plutôt que lui-même. Le fait que je ne critique pas ce groupe constitue pour certain un indice de soutien. Mais cela reste une supposition. D’abord parce que l’Etat islamique n’a certainement pas besoin de moi pour leur propagande. Qu’il se débrouille tout seul, je ne suis pas prêt à me sacrifier pour lui. Et puis je considère que le principal danger en Syrie et en Irak ce n’est pas cette organisation mais c’est l’ingérence iranienne chiite qui profite du chaos pour répandre son influence. Les dirigeants occidentaux sont complices de cette ingérence mais elle les arrange volontiers puisque les Iraniens sont les seuls à accepter d’envoyer des soldats affronter au sol les hommes de l’EI. Que l’on se comprenne bien. L’Etat islamique constitue une menace certaine pour l’occident mais, selon moi, elle n’est rien comparée à l’Iran. En ressort de mes articles une charge sévère contre les chiites iraniens, contre les Kurdes, mais également contre la coalition occidentale en Syrie et en Irak. Autrement dit, je suis davantage « anti » que « pro ». Pour l’Etat français, « les ennemis de mes amis sont mes ennemis », visiblement.
Le journaliste David Thompson m’accuse d’être favorable aux djihadistes qui combattent en Syrie et en Irak. En fait, ma position de départ est simple : je suis radicalement opposé à Bachar al-Assad. Et comme dit plus haut, je suis davantage « anti » que « pro ». Mon opposition viscérale anti-Bachar laisse entendre un soutien à ses opposants, ce qui n’est pas nécessairement vrai. Je m’attaque uniquement à Bachar, et non pas à ses opposants.
Je pense donc que j’ai payé mon engagement politique à la fois contre l’interventionnisme militaire arabo-occidental et chiite dans la région et contre les groupes armés soutenus par les acteurs précités. Ce qui a fait dire au Monde que je suis contre la « propagande chiito-occidentale ». Absolument, je me décris comme un opposant de la propagande chiito-occidentale et il me semble que cela est mon droit de l’être, quitte à ulcérer certains. Être contre cette propagande n’est pas illégal. C’est même la règle du jeu. Cela ne signifie pas non plus un anti-occidentalisme primaire. Les va-t’en guerre aux commandes des Etats occidentaux ne représentent pas l’occident dans sa globalité.
Je suis parfaitement conscients que mes articles ont pu déranger voire même choquer mais il y a une exagération dans ce blocage. Savez-vous qu’il existe des sites qui diffusent du contenu de l’Etat islamique et qui sont toujours libre d’accès en France ? On dira qu’ils sont maintenus ouverts pour les surveiller. Mais je pense que cela cache surtout une autre réalité : l’Etat français ne peut pas s’attaquer aux gros sites par un simple blocage administratif. Il sera pointé du doigt par tout le monde et sera attaqué en justice par les hébergeurs. Mais en revanche bloquer un petit site comme le mien, il l’a fait directement car il savait pertinemment que personne ne s’en rendra vraiment compte et que je n’aurai pas les moyens de leur tenir tête. De plus, personne ne s’indignera. Il a eu raison.
Comme dit en préambule, islamic-news.info c’est fini. Le mal est déjà fait. L’étiquette du « terrorisme » a été déposée et personne ne pourra l’enlever même pas la décision d’un juge. La page Facebook a été supprimée sans aucune raison. Mon compte Facebook personnel est vide, je n’ai jamais rien publié et pourtant il a été supprimé. J’ai fait un appel auprès de Facebook. J’attends leur réponse.
Pour finir, un aspect technique. Le site n’est pas supprimé. Le serveur est simplement down car je n’ai pas réglé à temps la facture. Aussi simple que cela."
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