L’annonce a été faite mi-janvier : pour rester dans la course des superordinateurs, les pays membres de l’Union européenne doivent travailler de concert pour rivaliser avec les ténors du secteurs que sont la Chine, les États-Unis et le Japon. Aussi a-t-il été décidé, dans le cadre de l’initiative EuroHPC (pour «High Performance Computing »), de développer des supercalculateurs de « classe mondiale ».
Pour faire face aux géants du secteur, l’Union plaide pour la mutualisation des moyens. « Une infrastructure partagée et l’utilisation commune des capacités existantes profiteraient à tous, grandes entreprises, PME, chercheurs, secteur public et plus particulièrement les (petits) États membres qui ne disposent pas d’infrastructures HPC nationales autonomes », explique la Commission.
Dans ce cadre, EuroHPC va bénéficier d’un budget d’environ un milliard d’euros : une enveloppe de 486 millions d’euros sera dégagée sur les fonds de l’Union tandis que les États membres fourniront collectivement le même montant. Il est aussi prévu de laisser une place aux entités privées, mais leur contribution se fera en nature. L’initiative doit se poursuivre jusqu’en 2026.
L’initiative, justement, séduit les « petits » pays européens qui n’ont pas forcément les moyens de disposer d’un supercalculateur ou, lorsque c’est le cas, ne peuvent au mieux en aligner qu’un, voire deux. Depuis le lancement de l’initiative le 23 mars 2017 avec premier groupe de sept pays (Allemagne, Espagne, France, Italie, Luxembourg, Pays-Bas et Portugal), plusieurs autres ont rallié le mouvement.
C’est le cas de la Belgique, de la Slovénie, de la Bulgarie, de la Grèce et la Croatie. On compte même un pays hors de l’Union européenne avec la Suisse. Et en fin de semaine dernière, c’était au tour de la République tchèque d’annoncer son engagement en faveur d’EuroHPC, ce qui a ravi Mariya Gabriel, la commissaire européenne en charge de la politique numérique européenne.
En effet, l’intéressée s’était inquiétée, dans une tribune publiée sur le site Maddyness, de voir l’Europe « en train de perdre sa place dans le peloton de tête pour les capacités des infrastructures de calcul à haute performance, la Chine, les États-Unis et le Japon l’ayant devancée ». Une assertion qu’il convient toutefois de nuancer : si la Chine et les USA sont effectivement en tête, les Européens restent dans le coup.
Enjeu stratégique
Le classement du Top 500 des supercalculateurs les plus performants au monde est un bon indicateur en la matière : dans sa dernière version, il liste 84 machines pour le Vieux Continent. En comparaison, le Japon en a 35. Certes, une telle comparaison a ses limites — le Japon n’est qu’un seul pays face à un collectif d’États –, mais elle illustre bien ce qu’il peut se passer lorsqu’on l’on unit ses forces.
C’est un enjeu commercial et industriel pointe Mariya Gabriel : « sans installations de calcul à haute performance d’envergure mondiale, l’Europe ne pourra pas réaliser son ambition de devenir une économie des données dynamique », citant des applications dans des secteurs aussi variés que la santé, la sécurité routière, les sources d’énergie renouvelables, l’ingénierie et la cybersécurité.
C’est aussi un enjeu stratégique : l’Europe « ne peut pas non plus prendre le risque de voir les données produites par la recherche et l’industrie européenne être traitées ailleurs en raison du manque de capacités de calcul à haute performance », explique la commissaire, aux États-Unis ou en Chine par exemple, là où le rapport aux données et les règles fixant leur usage ne sont pas les mêmes que sur le Vieux Continent.
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