Pour tenter de faire des économies tout en augmentant l’efficacité de ses avertissements, la Hadopi teste l’envoie de courriers en lettre simple, avant l’envoi éventuel de recommandés. Une méthode conforme à la lettre de la loi, mais qui n’était pas prévue par le législateur.

Nextinpact rapporte que la Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet (HADOPI) expérimente l’envoi de lettres simples aux abonnés à internet qui ont déjà un reçu un premier avertissement par e-mail. L’objectif officieux est très certainement de faire peur aux internautes qui ne voient pas toujours les e-mails envoyés à l’adresse fournie par leur FAI, et d’obtenir leur réaction dès l’envoi de ce premier courrier postal, avant de devoir envoyer une lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR). Ces dernières pèsent lourd sur un budget réduit de plus en plus difficile à boucler.

La pratique expérimentée relève toutefois d’une interprétation très libre de la loi, ce dont l’Hadopi est coutumière depuis les premiers jours.

L’article L331-25 du code de la propriété intellectuelle dispose en effet que lorsqu’elle prend connaissance d’un partage illicite d’oeuvre sur un réseau P2P, la Hadopi peut envoyer à l’abonné « par la voie électronique » un premier avertissement à l’abonné dont l’adresse IP a été interceptée par les ayants droit, pour lui recommander de faire le nécessaire pour éviter toute récidive. Mais il ajoute qu’« en cas de renouvellement, dans un délai de six mois », la commission de protection des droits (CPD) de l’Hadopi « peut adresser une nouvelle recommandation comportant les mêmes informations que la précédente par la voie électronique », et que dans ce cas, elle « doit assortir cette recommandation d’une lettre remise contre signature ou de tout autre moyen propre à établir la preuve de la date de présentation de cette recommandation ».

Ainsi la CPD « peut» envoyer un e-mail en cas de récidive, auquel cas elle « doit » envoyer une LRAR. Mais si elle choisit d’envoyer une lettre simple en guise de second avertissement, elle n’est plus obligée de l’assortir d’un recommandé. C’est une interprétation littérale de la loi, qui n’était pas du tout l’intention du législateur, mais qui permet à la Haute autorité de tenter d’obtenir un effet dissuasif dès la lettre simple, avant de devoir envoyer la LRAR.

Car sans cette dernière, il sera de toute façon impossible d’aller jusqu’à la troisième phase, permettant un éventuel transfert du dossier au procureur.

L’expérimentation permettra d’établir des statistiques pour vérifier si, au final, envoyer une lettre avant d’envoyer un second courrier en recommandé revient moins cher que d’envoyer directement une LRAR.

Alors que cela fait plus de 4 ans que l’Hadopi envoie des millions d’avertissements aux internautes, l’autorité administrative n’a jamais envoyé autant de mails aux abonnés, ce qui permet de douter fortement de l’efficacité de la riposte graduée. 4,3 millions de courriels ont été envoyés jusqu’à ce jour, accompagnés par près de 440 000 lettres recommandées.

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