L'UMP a dévoilé ce mercredi matin son application Direct Citoyen, disponible sur iOS ou Android. "Tous les jours notre communauté sélectionne une question, une idé?e, un débat qui fait l'actu mais pour lequel personne ne te demande ton avis", dit le site de l'application, qui se permet le tutoiement, parce que l'appli est avant tout faite pour les djeuns. "Ici on donne son avis en un click, on fait entendre sa voix, on dit ce qu'on pense, on donne son opinion. Direct.".
"Et petit à petit, ensemble, jour après jour, d'idée nouvelle en idée nouvelle, on refait la France !" (mais sans convoquer une constituante, il ne faudrait tout de même pas que refaire la France commence par refaire les institutions qui pourraient nuire au quasi bipartisme actuel).
En pratique, l'application permet aux militants de proposer des questions, avec différentes présentations possibles, par exemple pour donner le choix entre deux options seulement, proposer un choix multiple, demander aux internautes de donner donner une note à la proposition, ou encore de répondre en donnant un nombre (par exemple, "combien de mois devraient-on conserver les données de connexion de tous les internautes ?"). Et bien sûr, l'application permet d'y répondre.
"Direct Citoyen est la première application mobile de démocratie directe lancée par un parti politique français. C'était un engagement de notre Président. C'était une demande forte de tous nos adhérents. C'est désormais une réalité", explique l'UMP, dont le logo n'apparaît pas dans l'application. Il est tout de même demandé de s'inscrire en fournissant une adresse e-mail et un nom, et "en m'inscrivant, j'accepte de recevoir des informations de Direct Citoyen et de l'UMP". Pas d'opt-out possible aux mailings politiques.
BLAGUES ET PROPAGANDES INTERDITES
Pour commencer à utiliser l'application, il faut obligatoirement valider l'adresse e-mail par un code reçu par courriel. Mais "l'application est en phase beta pour l’instant et les utilisateurs seront activés progressivement jusqu’au 31 mai", prévient un mail qui nous a été envoyé lors du test. "Vous serez notifié(e) dès que l’accès à Direct Citoyen vous sera ouvert".
"Pour pouvoir être inscrits, les internautes doivent fournir des coordonnées personnelles et des informations exactes, à jour, ne portant pas préjudice aux intérêts et aux droits de tiers: nom, prénom, identifiant, adresse de courrier électronique valide", précisent les conditions d'utilisation de Direct Citoyen. "D'autres questions sont facultatives seront également demandées afin d’assurer le bon fonctionnement du Site et l’organisation des débats : prénom, nom, photo, sexe, année de naissance, titre, biographie, ville d’origine, pays, site perso, compte Facebook, compte Twitter, compte Linkedin".
Aussi, "l’internaute s’engage à ne pas s’inscrire sous une fausse identité et à ne pas manipuler les identifiants dans le but de dissimuler l’origine réelle d’un contenu". Pas question de s'inscrire en tant que François Hollande, Oui Oui ou Carla Bruni.
De plus, le membre inscrit sur Direct Citoyen "ne peut pas (…) utiliser le Site aux fins d'une propagande politique, religieuse, philosophique allant à l'encontre des restrictions de la liberté d'expression reconnues par l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et de sa jurisprudence".
UN FICHIER DES OPINIONS DE CHAQUE MEMBRE ?
En revanche, les CGU ne disent rien de l'éventuelle conservation des votes de chaque utilisateur, qui permettrait à l'UMP de connaître précisément les opinions de chacun de ses adhérents sur chacun des thèmes auxquels ils ont répondu. Les conditions disent que seules les données fournies à l'inscription sont conservées, ainsi que les adresses IP et cookies nécessaires aux statistiques de connexion. Mais il n'est pas fait mention des données, pourtant essentielles, qui permettent de s'assurer qu'une personne n'a déjà voté sur une question.
Toujours selon les conditions affichées par l'UMP, l'application serait hébergée par "Voice Polls sur Amazone" (sic). En fouillant, on découvre qu'il s'agit en réalité du nom d'une application éditée par une société américaine (appelée "Poutsch" !). L'application est très proche de Direct Citoyen, qui semble donc n'en être qu'une déclinaison réalisée sous marque blanche. Or ses propres informations sur la vie privée des utilisateurs sont beaucoup plus instructives :
You also provide us information by posting content on to the Service (“User Content”). Your questions, answers, comments, other contributions on the Service, and metadata about them (such as when you posted them), are publicly viewable on the Service, along with your name (unless you decide to post anonymously). This information may be searched by search engines and be republished elsewhere on the Web in accordance with our Terms of Service. By deciding to ask and/or answer a question publicly you agree to have your question and/or answer publicly viewable on the Service.
(…)
Any answers publicly made to a question posted on the Service, including yours, will be viewable by any user who answers this very question. You have the choice to answer anonymously.
(…)
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En clair ou pour ceux qui ne parlent pas anglais, Voice Polls collecte toutes les réponses réalisées, et les rend publiques si l'utilisateur ne choisit pas de répondre anonymement. S'il choisit de répondre anonymement, ses réponses sont conservées par Voice Polls, mais pas affichées.
Nous ne savons pas si Direct Citoyen fonctionne sur ce même modèle, mais c'est très probablement le cas. Il faudra aussi s'interroger sur l'éventuel transfert des données des utilisateurs du service de l'UMP vers cette société privée américaine, surtout s'il est précisé que Direct Citoyen est "hébergé par Voice Polls". Rien n'est prévu dans les conditions d'utilisation de l'UMP sur un éventuel transfert de données.
Nous avons voulu demander à l'UMP en passant par l'adresse de contact indiquée dans les conditions d'utilisation, mais…
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