Le droit d’auteur fait depuis de nombreuses années l’objet de débats enflammés, en particulier sur la durée des droits patrimoniaux après la mort du créateur, la place qui est donnée au domaine public, son rapport aux licences d’exploitation permissives (comme les Creative Commons) ou bien sa capacité à s’adapter aux usages qui sont nés sur le net ou qui ont été développés par son influence.
Le fait est que la propriété intellectuelle est aujourd’hui relativement remise en cause par des pratiques — l’existence du piratage en est la preuve, même si celui-ci ne date bien sûr pas de la démocratisation du web. Des copies pirates existaient bien avant, sur disquette, sur VHS ou sur K7. Le net a néanmoins donné une puissance nouvelle à ce phénomène, favorisée au départ par une offre légale inadaptée.
C’est cette réalité qui préoccupe Grégory Besson-Moreau. Dans une question écrite qui est adressée à Jean-Michel Blanquer, le ministre de l’éducation nationale, le parlementaire élu de l’Aube et membre de la République en marche se dit attentif au « rapport des jeunes à la propriété intellectuelle », qui n’est, à ses yeux, pas vraiment favorable au respect du droit des auteurs.
Il s’appuie pour cela sur une étude de 2017 émise par l’office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle. Dans celle-ci, il est dit « que les citoyens âgés de 15 à 24 ans sont les plus tolérants vis-à-vis de la contrefaçon et du piratage : 15 % d’entre eux reconnaissent avoir intentionnellement acheté un produit contrefaisant au cours des douze derniers mois ».
« L’ampleur du défi d’inculquer aux générations futures une compréhension et un respect des droits de propriété intellectuelle »
Il est ajouté que « 27 % d’entre eux admettent avoir sciemment accédé à du contenu provenant de sources en ligne illégales ; 41 % d’entre eux trouvent l’achat de contrefaçons admissible si le prix de l’original est trop élevé. Il ressort également de cette étude que l’avis selon lequel la propriété intellectuelle freine l’innovation est plus répandu parmi les jeunes de 15 à 24 ans ».
Pour le député, « ces résultats font apparaître ‘l’ampleur du défi d’inculquer aux générations futures une compréhension et un respect des droits de propriété intellectuelle’ », qui nécessitent d’aller plus loin que les « initiatives [qui] ont déjà été prises par les secteurs public et privé en vue de renforcer l’éducation à la propriété intellectuelle ».
Il convient donc de faire, selon le parlementaire, un « effort de pédagogie accru ». Il propose pour cela de s’inspirer des expériences étrangères (verra-t-on une sorte de Captain Copyright dans l’Hexagone, comme ce qui a été tenté au Canada il y a une dizaine d’années ?), en envisageant d’intégrer «un volet ‘propriété intellectuelle’ dans les programmes d’enseignement moral et civique ».
Un enseignement déjà prévu
Le fait est que le code de l’éducation inclut déjà des passages prévoyant un enseignement sur les risques liés aux usages d’Internet et au piratage des œuvres.
L’article L312-9 dispose par exemple que « la formation à l’utilisation des outils et des ressources numériques est dispensée dans les écoles et les établissements d’enseignement […]. Elle comporte une sensibilisation aux droits et aux devoirs liés à l’usage de l’internet et des réseaux, dont la protection de la vie privée et le respect de la propriété intellectuelle ».
Cet article, classé à la section portant sur la formation à l’utilisation des outils et des ressources numériques, fait d’ailleurs passablement doublon avec un autre extrait du même code, le L312-6, qui concerne les enseignements artistiques.
On y lit que « les élèves reçoivent une information sur les dangers du téléchargement et de la mise à disposition illicites d’œuvres ou d’objets protégés par un droit d’auteur ou un droit voisin pour la création artistique ».
La Hadopi se mobilise aussi
La démarche entreprise par Grégory Besson-Moreau est le dernier exemple de l’idée selon laquelle il convient de promouvoir le droit d’auteur à l’école, en se concentrant sur les jeunes générations.
En 2011, la députée UMP Muriel Marland-Militello avait par exemple demandé au ministre de l’éducation nationale de l’époque un renforcement de la sensibilisation des jeunes à l’action de la Hadopi et au danger du piratage. La Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet s’est elle-même impliquée, via des dessins animés ou en se rendant au salon Kidexpo, destiné aux enfants de 4 à 14 ans.
L’approche du dessin animée avait déjà été expérimentée en 2009 avec une vidéo éducative diffusée par France 5 l. Baptisé Super Crapule, le clip mettait en scène la Hadopi sous forme de super-héros dont la mission consiste à lutter inlassablement contre le téléchargement illégal. L’opération avait été vivement contestée, forçant France 5 à reculer en admettant des « erreurs factuelles ».
D’autres pistes ont aussi été envisagées, mais sans nécessairement se traduire de façon concrète, qu’il s’agisse d’un diplôme au collège remis aux élèves ayant bien intégré la nécessité du droit d’auteur, la fonction de la riposte graduée et les missions de la Hadopi, ou bien d’un portail dédié à l’Internet responsable, porté par le ministère de l’éducation nationale, avec une sensibilisation aux lois Hadopi et Dadvsi.
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