Facebook a encore connu des déboires avec sa politique de modération. Cette fois, c’est une statuette du Paléolithique supérieur, la Vénus de Willendorf, qui en a fait (provisoirement) les frais.

Décidément, les petites mains et les algorithmes qui s’occupent de la modération sur Facebook ont des progrès à faire pour appliquer avec discernement les règles du réseau social. Certes, le site communautaire prévoit dans son règlement une interdiction de la nudité. Mais à la même rubrique, il est aussi prévu une série d’exceptions, notamment quand il est question de nudité dans les arts.

« Nous autorisons également les photos de peintures, sculptures et autres œuvres d’art illustrant des personnages nus », énonce ainsi Facebook. Malgré cela, il y a a priori une limite à ce qui peut être montré au nom de l’art. Ainsi, il ne semble pas possible de diffuser un contenu « illustrant explicitement des rapports sexuels ». Pour le consulter, il faudra aller sur un site externe.

Image d'illustration. // Source : Pixabay

Ça, c’est pour la théorie. En pratique, le réseau social s’est raté à quelques reprises : le cas le plus connu est sans doute celui de la censure du tableau L’Origine Du Monde, du peintre Gustave Courbet, pour lequel une action en justice a été engagée en 2011 et dont le verdict de la cour d’appel de Paris doit survenir courant mars. Mais il en existe quelques autres, qui ont parfois fait l’objet d’un papier dans ces colonnes.

Une photographie de la fontaine de Neptune située sur la Piazza Maggiore, à Bologne en Italie, un dessin de presse publié dans le magazine américain New Yorker montrant les seins d’Ève, une caricature zoophile du président turc Recep Tayyip Erdoğan ou encore un cliché d’une femme partiellement dévêtue qui était exposé au centre d’art parisien du Jeu de Paume, constituent ainsi quelques regrettables exemples.

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CC Ziko van Dijk

Une Vénus de plus de 10 000 ans

Le dernier dérapage connu de la modération incohérente de Facebook implique la Vénus de Willendorf, une statuette confectionnée pendant le Paléolithique supérieur, il y a plus de 10 000 ans, à la fin de la dernière ère glaciaire, à une époque où l’on pouvait encore croiser des mammouths. C’est à cette même époque que l’homme de Néandertal disparaît, ne laissant plus que l’homme moderne  dans la course.

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CC Bwag

Cette statuette, qui fait partie de ce qu’on appelle les vénus paléolithiques, représente une femme aux proportions exagérées (est-ce pour représenter l’obésité ?). Elle est nue mais le corps est assez peu détaillé, contrairement à la tête : si le visage n’est pas taillé, on constate qu’un travail de sculpture particulier a été effectué sur le haut du crâne. Les motifs de la création de la statuette demeurent incertains.

L’affaire, signalée par la revue spécialisée Art Newspaper, trouve son origine dans la publication d’un message contenant une photographie de la statuette, fin décembre 2017. Ce n’est pas le Musée d’histoire naturelle de Vienne en Autriche, qui expose la Vénus de Willendorf, qui l’a publiée mais, selon l’AFP, une activiste des arts italienne, Laura Ghianda.

Il apparaît que le cliché ne figurait manifestement pas dans un statut classique mais dans une publication ayant vocation à être « boostée », c’est à dire mise en avant pour atteindre davantage de membres, en échange d’un paiement auprès de Facebook. C’est le sens du propos de Laura Ghianda, qui a réagi sur la page Facebook du musée, Naturhistorisches Museum Wien (NhM).

Une publication « boostée »

« Je dois dire qu’il s’agissait d’une publication ‘boostée’. C’est la promotion qui a été bloquée parce que l’algorithme l’a reconnue comme une femme nue, comme de la pornographie. J’ai alors fait appel quatre fois mais je n’ai pas eu ma publication ‘boostée’. C’est seulement, après, quand j’ai écrit le message, que c’est devenu viral. Je pense que je vais lancer une pétition pour pousser Facebook à changer les algorithmes car ce n’est pas le seul cas ».

Facebook confirme cette explication : « Nous avons indiqué à l’annonceur que nous approuvons son annonce », a réagi auprès de l’AFP une porte-parole du site communautaire. « Cette annonce aurait dû être approuvée », a ajouté la porte-parole, au motif que, justement, les règles du réseau social, prévoient certaines exceptions — mais qui peuvent être retreintes.

Facebook limite parfois l’affichage de scènes de nudité, car certains publics n’ont pas l’âge requis ou parce que leur culture n’a pas le même rapport au corps

Le site ajoute néanmoins qu’il peut limiter « l’affichage de scènes de nudité, car certaines audiences au sein de notre communauté mondiale peuvent être sensibles à ce type de contenu, en particulier de par leur culture ou leur âge ». De son côté, le musée autrichien, qui dit n’avoir jamais subi la censure de Facebook, a réagi en publiant une photographie de la statuette sur sa page.

« Nous estimons qu’un objet archéologique, et tout particulièrement une icône de ce type, ne doit pas être interdit sur Facebook, pas plus qu’aucune autre œuvre d’art », a ajouté le musée, cité par l’AFP. Et de prévenir qu’il est hors de question de couvrir la figurine, que ce soit dans la musée, sur le web ou sur Facebook. Le réseau social, de son côté, a présenté ses excuses.

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