Pour le moment, YouTube conserve la vidéo réalisée sans consentement par des proches de Vincent Lambert, qui montre le malade dans son état de tétraplégique. Est-ce conforme à ses règles, et à la loi ?

C'est peut-être un débat qui agitera les tribunaux, c'est en tout cas une question intéressante sur les frontières que se fixe YouTube à ce qu'il accepte d'héberger. Peut-être parce qu'elle n'a pas été sollicitée en ce sens malgré les nombreux votes négatifs exprimés par les internautes, ou parce qu'elle n'a pas jugé la vidéo contraire à ses règlements, la plateforme de Google a laissé en ligne la vidéo insupportable réalisée par le comité de soutien de Vincent Lambert, censée démontrer que l'homme devenu tétraplégique serait encore conscient et capable de réagir à des stimuli — ce que les médecins attribuent pour leur part à de simples réflexes inconscients.

Sans entrer dans le débat sur l'atteinte portée à la dignité du malade, en elle-même condamnable, le moins que l'on puisse constater est que la vidéo viole le droit à la vie privée de Vincent Lambert. Or le règlement de YouTube est censé protéger la vie privée, ce qui est d'ailleurs imposé par l'article 9 du code civil. Peu importe qu'il y ait préjudice ou non, la vie privée est un droit et sa violation est interdite.

"Si vous ne pouvez pas parvenir à un accord avec l'utilisateur, ou si vous ne souhaitez pas le contacter directement, vous pouvez demander la suppression du contenu", prévient YouTube. Mais cette suppression n'a rien d'automatique.

PAS DE SUPPRESSION SYSTÉMATIQUE

Tout d'abord, "pour que le contenu soit examiné en vue d'une éventuelle suppression, la personne en question doit être identifiable de manière unique", explique la firme sur ses consignes en matière de confidentialité. C'est le cas pour Vincent Lambert. Mais par exemple, "Lorsque nous examinons un contenu en vue d'une éventuelle suppression pour atteinte à la vie privée, nous tenons également compte de l'intérêt général, de l'intérêt médiatique et du consentement général y afférent", et "la décision finale de savoir si le contenu porte atteinte ou non aux consignes en matière de confidentialité du site appartient à YouTube".

Comme pour le droit à l'oubli qui lui est imposé sur le moteur de recherche Google, c'est donc YouTube qui décide souverainement de ce qui doit primer, entre la vie privée du malade ou le droit des proches à faire connaître sa situation au public.

Reste un autre problème. Qui peut demander la suppression de la vidéo ? En règle général les réclamations doivent émaner de la personne dont la vie privée est violée, ce qui ne peut évidemment pas être le cas de Vincent Lambert. Mais elle peut aussi être envoyées par des tiers, notamment "si la personne concernée est vulnérable". 

Toutefois, YouTube demande que la requête soit alors envoyée par un parent, tuteur ou représentant légal, et n'accepte pas les demandes de proches, y compris de l'épouse ou des frères et soeurs. 

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