Alors que le commentaire officiel du Conseil constitutionnel est censé éclairer sur les intentions des Sages, le commentaire de la décision validant le projet de loi Renseignement et ses boîtes noires n'apporte strictement aucune explication à une décision elle-même vide d'arguments. Ce qui conforte l'hypothèse d'une décision exclusivement politique, et non juridique.

Comme le veut la coutume, le Conseil constitutionnel a publié son propre commentaire (.pdf) de sa décision du 23 juillet 2015, qui valide l'essentiel de la loi Renseignement. Ce type commentaire sert généralement à éclairer les juristes et les observateurs sur la logique interprétative suivie par les Sages pour décider de valider ou de censurer une disposition législative. A titre d'exemple, quand le Conseil constitutionnel avait validé la censure de sites pédophiles sans passer par un juge, c'est dans son commentaire qu'il avait expliqué qu'il s'agit de "lutter contre l'exploitation sexuelle des mineurs, ce qui peut justifier des mesures que la préservation de la propriété intellectuelle ne peut fonder".

Mais ne cherchez pas la moindre explication de la validation des boîtes noires dans le commentaire officiel du Conseil constitutionnel. Tout comme le texte de la décision fait l'économie de toute explication et se contente de reprendre point par point les éléments prévus par la loi pour conclure sèchement qu'il est proportionné, les fonctionnaires chargés d'éclairer la jurisprudence du Conseil n'ont pas trouvé les mots pour expliquer la décision des juges. Peut-être parce qu'elle est inexplicable.

On sent à travers cette absence de commentaire tout l'embarras d'un Conseil constitutionnel qui n'a pas jugé en droit, ce qui est plus que gênant s'agissant de la plus haute juridiction française, mais par raison d'état. Et sans doute, peut-on craindre, par peur. Le gouvernement ayant usé de l'argument de la tête tranchée, le Conseil n'a certainement pas voulu prendre le risque politique d'être accusé d'avoir permis de nouvelles décapitations, en cas de nouvel attentat. A la défense des libertés, il a préféré défendre sa sécurité.

La décision du Conseil se contentait de citer la loi sans la commenter et de conclure d'une phrase que "ces dispositions ne portent pas une atteinte manifestement disproportionnée au droit au respect de la vie privée". Le commentaire du Conseil constitutionnel se contente de citer la décision du Conseil sans la commenter :

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