Voilà un jugement qui risque fort d’agacer Donald Trump, vu l’usage frénétique qu’il a de Twitter. En effet, la juge fédérale du district de Manhattan, Naomi Reice Buchwald, a déclaré mercredi 23 mai que le président des États-Unis n’a pas le droit de bloquer des individus sur son compte en raison de leurs opinions. Pour trancher, la magistrate s’est appuyée sur la Constitution américaine.
« Cette affaire nous oblige à nous demander si un fonctionnaire peut, conformément au Premier amendement [celui relatif à la liberté d’expression, ndlr], bloquer une personne sur son compte Twitter en réponse aux opinions politiques qu’elle a exprimées, et si l’analyse diffère parce que ce fonctionnaire est le président des États-Unis. La réponse aux deux questions est non », lit-on dans la décision.
Autrement dit, Donald Trump doit accepter toutes les opinions politiques qui lui sont adressées via Twitter, y compris et surtout celles avec lesquelles il est en désaccord. Il n’est certes pas obligé d’y répondre, mais il n’a pas le droit de les empêcher de s’exprimer — car la conséquence d’un blocage fait qu’il est impossible d’interpeller une personne ou de commenter l’un de ses messages.
Le jugement rendu par la magistrate américaine est une grande victoire pour les personnes qui avaient porté plainte en juillet dernier.
L’organisation Knight First Amendment Institute, liée à l’université Columbia, et sept personnes avaient ainsi lancé une action en justice au motif « Trump et son équipe de communication violent le premier amendement » de la Constitution en « bloquant des utilisateurs du compte Twitter @realDonaldTrump parce qu’ils ont critiqué le président ou sa politique ».
Le jugement considère en effet que Twitter est, dans ce cas de figure, plus qu’un réseau social : c’est aussi un forum public d’un élu.
L’institut estimait que le compte Twitter de Donald Trump, devenu président, doit être considéré comme un espace de discussion public, à l’image de ce que sont les réunions d’un conseil municipal. Or, tout comme n’importe qui a le droit d’assister à un conseil municipal, chaque citoyen américain doit pouvoir lire les messages de Donald Trump et y répondre directement.
Appel… ou mise en sourdine
Il reste désormais à savoir si Donald Trump va débloquer les personnes concernées, dont le nombre exact n’est pas connu. En la matière, la justice ne se montre pas trop pressante. Comme le note l’AFP, la juge n’a pris aucune injonction qui ordonne au chef de l’État de débloquer ces personnes, celle-ci considérant que c’est à lui de le faire en interprétant son jugement.
Sur le plan juridique, l’affaire pourrait ne pas en rester là. Sollicité par The Verge, un porte-parole du département de la justice a déclaré que le gouvernement est en « désaccord respectueux avec la décision du tribunal et envisage les prochaines étapes », ce qui ouvre la voie à un éventuel appel… avant, peut-être, une action devant la Cour suprême des États-Unis.
L’autre solution, nettement moins juridique, consisterait pour l’équipe de Donald Trump à transformer cette politique, en passant du blocage à la mise en sourdine. En effet, le verdict fait une distinction entre ces deux modes. Dans le cas de la mise en sourdine, un internaute a toujours la possibilité de voir les messages de la personne qui l’a activée, mais aussi d’y répondre. Seulement, ces messages ne seront pas lus par la personne qui a activé cette option.
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