Lorsque Facebook a vu le jour en 2004, Mark Zuckerberg ne s’attendait certainement pas à devoir faire la chasse aux campagnes d’influence étrangère sur le réseau social. Il ne s’agissait au départ que d’un projet visant à favoriser des rencontres étudiantes. Quatorze ans plus tard, les choses ont bien changé : si la mise en relation n’a pas été perdue de vue, il doit désormais prendre garde à la propagande politique.
Et cette surveillance est digne de la malédiction de Sisyphe. Depuis bientôt deux ans, c’est-à-dire depuis la percée de Donald Trump dans l’opinion publique, et dont la conséquence a été son élection à la présidence des États-Unis, le site communautaire doit intervenir sur sa plateforme pour contrer les opérations de manipulation — même si au départ, leur portée était minorée par le jeune milliardaire.
Maintenant que Mark Zuckerberg a promis de réparer Facebook cette année, les équipes du réseau social n’ont pas d’autre choix que de prendre le problème à bras le corps (même si, au nom de la liberté d’expression à l’américaine, qui est bien plus permissive que le cadre français, une ambivalence dans la lutte contre les articles relayant des théories du complot et les informations mensongères se constate).
« Comportements inauthentiques et coordonnés »
Ce printemps, l’entreprise a ainsi mis en avant son action contre la société IRA (Internet Research Agency), qui est accusée d’agir pour le Kremlin sur la toile. La plateforme a fermé 70 comptes 138 pages, et supprimé 65 autres profils sur Instagram, l’une de ses filiales. Pour expliquer cette manœuvre, le site a donné les indices l’ayant conforté dans la thèse d’une campagne d’influence visant les russophones.
Rebelote quatre mois plus tard : dans un billet de blog publié le 21 août, Facebook déclare avoir pris des mesures additionnelles pour mettre fin à des « comportements inauthentiques et coordonnés ». Cela s’est traduit concrètement par la fermeture de plusieurs centaines de pages, groupes et comptes provenant d’Iran et de Russie, qui sont aujourd’hui deux adverses politiques des USA sur le plan diplomatique.
« Il s’agissait de réseaux de comptes qui induisaient les gens en erreur sur qui ils étaient et ce qu’ils faisaient. Nous interdisons ce genre de comportement parce que l’authenticité est importante. Les gens doivent pouvoir faire confiance aux connexions qu’ils établissent sur Facebook », a déclaré Mark Zuckerberg dans une conférence téléphonique, dont la transcription a été transmise par le réseau social.
C’est grâce à FireEye, une entreprise spécialisée dans la sécurité informatique, que le site a eu vent, en juillet, d’un réseau de pages connu sous le nom de Liberty Front Press.
Celui-ci comptait 70 comptes et 3 groupes Facebook, mais aussi 76 comptes Instagram. Ces espaces étaient suivis par 155 000 personnes sur Facebook et 48 000 sur Instagram. De plus, ce réseau avait des liens cachés avec les médias d’État iraniens et a dépensé plus de 6 000 dollars dans de la publicité politique entre 2015 et aujourd’hui. Le réseau a enfin accueilli trois événements.
Toujours selon Facebook, Liberty Free Press était impliqué dans des pages mimant des organismes de presse tout en piratant les comptes d’individus et en propageant des logiciels malveillants. Ici, le réseau comptait 12 pages et 66 comptes, et 9 comptes Instagram. Le site a dénombré environ 15 000 abonnés sur Facebook et 1 100 sur le service de partage de photographies.
Deux autres opérations ont également été repérées par Facebook. La première impliquait des espaces pilotés par des agents russes du renseignement militaire, dont la cible politique était des personnes vivant en Syrie et en Ukraine — deux pays pour lesquels la Russie déploie beaucoup d’attention –, mais pas les États-Unis. La seconde visait les USA, le Royaume-Uni et le Moyen-Orient et était pilotée par l’Iran.
Là encore, ces manœuvres impliquaient le contrôle et l’animation de plusieurs centaines de pages et de comptes sur Facebook et Instagram, le recrutement d’un maximum d’abonnés et la dépense de quelques milliers de dollars dans de la publicité pour essayer de toucher un public le plus large possible, sans se faire repérer. Selon Facebook, certaines pages suspectes sont encore en phase d’investigation.
Facebook, qui dit avoir transmis toutes les informations utiles aux autorités américaines, s’attend à de prochaines opérations qu’il faudra repérer et neutraliser. « Bien que nous fassions des progrès dans l’éradication de ces abus, comme nous l’avons déjà dit, c’est un défi permanent parce que les personnes responsables sont déterminées et bien financées. Nous devons constamment nous améliorer pour garder une longueur d’avance ».
Un travail digne de Sisyphe.
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