C’est la dernière ligne droite de la mobilisation contre la directive européenne sur le droit d’auteur. Mercredi 12 septembre, le Parlement européen se penchera sur le projet de réforme et plus particulièrement sur les deux articles les plus controversés du texte : les numéros 11 et 13. De chaque côté, le lobbying sera sans nul doute très intense jusqu’au moment du vote en séance plénière.
Au cours des derniers jours, les tribunes se sont multipliées dans la presse.
À celle de la ministre de la culture Françoise Nyssen, qui a appelé, aux côtés de 200 personnalités, à « sauver » le droit d’auteur qui serait menacé par les activités des grandes plateformes du numérique, accusées de « pratiques déloyales » pour faire du « profit sur le dos des créateurs sans les rémunérer » s’est opposée une vague de prises de parole pour dénoncer les effets potentiels du texte.
Une vague ample et hétéroclite : on trouve pêle-mêle la Quadrature du Net, le Conseil national du logiciel libre, la fondation Wikimedia, l’April, des experts de haut niveau en informatique et même, contre toute attente, Pascal Nègre, l’ancien PDG d’Universal Music France. Ce dernier, qui a pourtant été un soutien constant de la loi Hadopi, juge que la directive aurait un effet négatif sur la création.
Si la ministre a pu compter sur le soutien de nombreuses personnalités pour donner de la force à sa tribune, il convient de noter que le projet de directive ne fait pas l’unanimité dans le monde de la culture et dans le milieu de la presse professionnelle : ainsi, si le PDG de l’AFP et dix journalistes ont signé la tribune, d’autres s’y opposent, à l’image du Syndicat de la presse indépendante d’information en ligne.
Les deux articles en question visent d’une part à instaurer un droit voisin pour les éditeurs de presse afin qu’ils aient un contrôle accru sur les contenus qu’ils publient sur Internet, et d’autre part à accroître la responsabilité des hébergeurs, comme YouTube ou Facebook, qui accueillent des contenus mis en ligne par les internautes, afin qu’ils filtrent encore plus, en particulier lors de l’upload, les fichiers protégés par le droit d’auteur.
Les risques rattachés à l’article 13 sur le filtrage au niveau du téléversement ont par hasard été illustrés par un incident survenu au début du mois de septembre. En effet, un pianiste qui avait mis en ligne une vidéo dans laquelle il interprétait lui-même un morceau de Jean-Sébastien Bach a été retiré par le système automatique de repérage de Facebook, au nom des droits de Sony Music.
Il s’avère que c’était un faux positif : les algorithmes du réseau social ont cru identifier une correspondance avec une œuvre sur laquelle Sony détiendrait des droits, mais à tort : ils ont confondu cette interprétation avec une autre. Ajoutez à cela que le passage en cause ne durait que 47 secondes et qu’il a été écrit par un compositeur mort il y a pratiquement 270 ans, à une époque où le droit d’auteur balbutiait à peine.
C’est un exemple très instructif des menaces que font peser certaines dispositions de la directive européenne. Un exemple qui explique aussi pourquoi l’on assiste à une telle mobilisation de la part de la société civile, avec des manifestations organisées dans la rue mais aussi des opérations en ligne pour tenter de convaincre les parlementaires de ne pas voter en faveur de cette réforme.
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