Ce geste, nous l’avons tous sûrement déjà reproduit une fois dans notre vie. Index et pouce liés en un cercle, les autres doigts en l’air… On l’utilise pour signifier à quelqu’un qui ne peut pas nous entendre (en plongée sous-marine par exemple) que tout va bien, ou pour piéger ses amis au fameux « jeu du rond », qui consiste à taper l’épaule de celui ou celle qui a regardé notre main ainsi positionnée.
https://www.youtube.com/watch?v=1glTOFPECNI
Il est revenu ce 14 mai dans l’actualité, suite à la publication sur Facebook d’un selfie. On y voit Marine Le Pen et un militant radical estonien, en train de faire le signe « OK ». Si cette photo a fait polémique, c’est parce que le geste a un sens caché : il est devenu le symbole d’extrémistes et suprémacistes blancs américains.
Marine Le Pen a assuré qu’elle ignorait tout de la signification cachée de ce geste. Dès qu’elle en a été informée, elle a d’ailleurs demandé à ce que la photo soit supprimée de Facebook, rapporte l’AFP.
Le geste « OK » devenu polémique
Deux vidéos avaient fait polémique pour cette même raison, il y a plusieurs mois. Sur la première, qui date du 4 septembre, on aperçoit Zina Bash, une femme politique américaine membre des Républicains, faire un « OK » de la main. Elle est accusée d’avoir ainsi prouvé son appartenance à des mouvances d’extrême-droite et doit se défendre, comme l’explique le Wall Street Journal dans un article.
Sur la seconde, repostée sur Twitter le 14 septembre, on voit, en arrière-plan d’une interview réalisée pour une chaîne télévisée américaine, un garde-côte effectuer le même geste. Quelques heures plus tard, son employeur annonçait publiquement sa mise à l’écart.
Dès 2015, plusieurs soutiens de Donald Trump utilisent le « OK ».
Pour comprendre tout ceci, il faut remonter à 2015. A cette époque, plusieurs soutiens de Donald Trump, qui vient d’annoncer sa candidature aux primaires républicaines, ainsi que des figures d’extrême-droite, commencent à utiliser le « OK » lors de leurs apparitions publiques. Selon le site Know your meme, « Pizza party Ben », un conservateur pro-Trump qui s’est fait connaître grâce à des blagues sur Vine et Twitter, serait le premier à avoir lancé le mouvement.
Un geste imité par des soutiens de Donald Trump
En avril, PizzaPartyBen poste une vidéo dans laquelle il dit « on devrait se détendre ». Il aurait écrit en-dessous « Les hommes blancs sont comme ça ». De cette vidéo qui n’est plus en ligne, on ne retrouve que des traces, à savoir des captures d’écran. Mais « Pizza Party Ben » reproduira plus tard le même geste, seul dans des vidéos…
… ou accompagné de son ami Milo Yiannopoulos (un conservateur connu pour ses discours haineux, racistes, sexistes et islamophobes), lors de rassemblements en soutien à Donald Trump, comme ici sur cette photo.
Des vineurs comme Mike Ma, des écrivains rompus aux théories du complot comme Mike Cernovich, le suprémaciste blanc Richard Spencer ou encore Malik Obama, le demi-frère de l’ancien président des Etats-Unis qui a toujours affiché son soutien à Donald Trump, ont ensuite suivi le mouvement.
Jim Hoft et Lucian Wintrich, du média d’extrême-droite The Gateway Pundit, se sont même payés le luxe de le hisser jusqu’à la Maison blanche, dans la salle de presse de cette dernière.
À force de voir ce symbole réutilisé par des figures d’extrême-droite américaines, le geste « OK » a fini par porter à confusion. Pour certains, il est clairement devenu un symbole de haine. Pour d’autres, il s’agirait avant tout… d’une vaste « blague ».
« Operation O-KKK » : quand 4Chan a fait du « OK » un mème
Sur le forum 4Chan, des internautes se moquent des médias et des anonymes qui selon eux, sur-interprètent le signe. Ils lancent « l’operation O-KKK » qui consiste, expliquent-ils, à « inonder Twitter et les autres médias sociaux avec des spams, déclarant que le signe OK fait avec la main est un symbole de la suprématie blanche. » « Faites de faux comptes avec des noms basiques de filles blanches et écrivez des merdes comme : oh mon dieu c’est si vraiiiii », conseille en anglais l’instigateur du mouvement, avant d’ajouter : « Ce serait bien aussi pour nous d’associer le signe OK à un symbole de suprémacistes blancs parce que Mel Gibson l’a utilisé. Des points bonus si votre photo de profil est en rapport avec le fait de soutenir le féminisme.»
Avec le hashtag #PowerHandPrivilege (littéralement, le privilège de la main du pouvoir), la campagne prend de l’ampleur. Certains exhument des photos ou vidéos de multiples artistes et personnalités le reproduisant, demandant ironiquement s’ils sont devenus eux aussi des suprémacistes blancs. Un mème est né.
Entre l’extrême-droite et leurs adversaires, pas de consensus sur le sens du « OK »
Depuis, la question de l’utilisation du geste « OK » n’a jamais été véritablement tranchée. Selon la ligue anti-diffamation (dont les explications ont été largement moquées par l’extrême-droite), il ne serait pas forcément un symbole établi d’une frange politique en particulier, mais serait en tout cas « devenu un geste populaire utilisé par des personnes appartenant à différents segments de la droite et l’extrême-droite – y compris des suprémacistes blancs ».
En septembre 2017, une vidéaste, auteure de la chaîne éducative ContraPoints, expliquait que les droites et extrêmes-droites avaient toujours aimé détourner des symboles qui au départ, étaient tout à fait innocents. Ce fut le cas de la Croix de fer, décoration militaire devenue synonyme sous le IIIème Reich, ou, dans une toute autre mesure, de Pepe the frog, une grenouille verte passée de personnage de bande-dessinée à mascotte politisée.
La vidéaste explique que selon elle, utiliser des symboles innocents n’est pas un hasard, car cela participe à la décrédibilisation de ses adversaires : on se moque d’eux parce qu’ils pensent voir dans un simple « OK » le signe d’un quelconque extrémisme, et ne comprennent, en gros, rien à rien.
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