Il y a plusieurs années, un groupe de journalistes, publicitaires et communicants s’est déchaîné contre de nombreuses victimes, à travers une « ligue du LOL » qui a harcelé des internautes sur les réseaux sociaux. L’affaire, qui a éclaté début février, questionne sur l’état du droit : que dit la loi face à ces agissements ? Que risquent leurs auteurs ? Faut-il allonger les délais de prescription ?
C’est quoi le cyberharcèlement
Le harcèlement est défini dans la loi comme le « fait de harceler une personne par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale ». Sa dimension « cyber » est prise en compte lorsqu’elle implique l’envoi de messages ou de propos à travers les réseaux.
En cas de cyberharcèlement, la responsabilité pénale retombe d’abord sur les épaules de celles et ceux qui en sont à l’origine. Cependant, il existe aussi une autre responsabilité, qui ne se déclenche que sous certaines conditions. Il s’agit de celle des hébergeurs, qui doivent en principe réagir promptement dès qu’on leur signale un message litigieux. Sinon, leur responsabilité peut être engagée.
Quand ce délit a-t-il été institué
Le délit de cyberharcèlement a été officialisé dans le droit français le 6 août 2014 avec la loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes. L’article ne reprend pas directement le terme de « cyberharcèlement », mais y fait référence indirectement en évoquant des faits commis via Internet. Auparavant, il fallait recourir aux dispositions juridiques classiques, à savoir le « simple » harcèlement.
Depuis 2018, la loi a été consolidée en traitant le cas des raids numériques contre une ou plusieurs personnes. Leur pénalisation survient quand leur caractère sexuel ou sexiste est démontré et le délit est constitué même quand un participant « n’a pas agi de façon répétée ». C’est en effet le tableau d’ensemble qui est considéré, et non chaque action individuelle.
Quelles sont les peines encourues ?
Le régime juridique de base prévoit qu’une personne se livrant à du harcèlement s’expose à un an de prison et 15 000 euros d’amende. La sanction peut toutefois être doublée (deux ans de prison et 30 000 euros d’amende) lorsque les faits « ont été commis par l’utilisation d’un service de communication au public en ligne ou par le biais d’un support numérique ou électronique ».
Dans certains cas de figure, le plafond des sanctions peut même atteindre trois ans de prison et 45 000 euros d’amende. C’est le cas si deux circonstances aggravantes se cumulent, par exemple le fait que le harcèlement se soit déroulé en ligne et qu’il ait entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours. Ces dispositions sont consignées à l’article 222-33-2-2 du Code pénal.
Quel est le délai avant la prescription ?
Les victimes de cyberharcèlement ont la possibilité de porter plainte pendant un délai de six ans après le dernier message caractérisé : après cette période, l’action au pénal s’éteint. Il est à noter que la loi de 2017 portant réforme de la prescription en matière pénale a doublé la fenêtre d’action pendant laquelle une victime peut agir. Avant le 28 février 2017, la prescription survenait au bout de trois ans.
Le calcul du délai de prescription se base sur le dernier message ou le dernier propos de la personne commettant un harcèlement. C’est ce que précise l’article 8 du Code de procédure pénale. Dans le cas des membres de la Ligue du LOL, qui semblent avoir été actifs surtout jusqu’en 2012, beaucoup de messages seraient irrecevables. Il faudrait en dénicher de plus récents pour pouvoir agir.
Est-ce qu’un allongement de la durée est à l’étude ?
Le délai de prescription est de six ans, une durée qui a doublé en 2017. Il pourrait toutefois être de nouveau prolongé dans un avenir proche. C’est en tout cas ce qu’a lancé entendre Marlène Schiappa, la secrétaire d’État à l’Égalité entre les femmes et les hommes, le 10 février. Elle répondait alors à Florence Porcel, l’une des victimes du gang de la Ligue du LOL.
« Rien n’empêche d’étudier l’allongement des délais de prescription, on vient de l’allonger de 10 ans pour les viols sur mineurs », déclare ainsi la ministre, qui promet d’en parler à sa collègue Nicole Belloubet, en charge du ministère de la justice. Aucun calendrier n’est pour l’heure suggéré. Dans ce débat, des voix s’élèvent toutefois pour appeler plutôt à accorder des moyens à la justice, afin qu’elle agisse avec célérité.
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